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FONTAINES. 443 caractère général est une originalité puissante, qui nous fait espérer de les admirer quelque jour en marbre, et de les voir substituées à ces épreuves en fonte que l'on voit par tout et dont le moindre défaut est la banalité. Rien de moins banal que les idées de M. Chenavard, parce qu'elles ne sont point isolées, mais toujours rattachées à un plan général, à quelque vue d'ensemble. S'agit-il d'un château d'été? Voici pour le bout de l'avenue la fontaine de Jouvence, où la déesse, élevée sur un autel antique, orné de bas-reliefs, semble appeler les ris et les jeux; rien de plus simple, rien de plus élégant. Voici pour le bas du vallon une vaste corbeille que sou- tiennent quatre lions marins : deux Génies ailés la rem- plissent à l'envi avec leurs urnes; l'onde s'élève en jet et retombe alentour, couvrant presque toute la construction et se perdant parmi la verdure des bords. A voir cette charmante composition, on la dirait conçue tout exprès pour le château de la Carelle, dans le Beaujolais. S'agit-il d'un port de mer ? La fontaine porte Neptune, qui promène un regard protecteur sur les navires que son pied fécond va approvisionner d'eau douce. Sur une autre, Arion trône avec son dauphin, pour rassurer sans doute l'aventureux passager. Les modèles destinés aux places publiques sont plus nombreux et très-variés. Dans quelques-uns, l'onde s'élève en jet énorme comme dans les vasques ordinaires ; mais M. Chenavard sait toujours jeter dans son œuvre un motif poétique. Ainsi sa Galatée se balance sur une conque inondée à demi, portée par deux tritons attentifs, mais point assez au gré de l'impérieuse déité; le flot retombe dans la vas- qae soutenue par deux hippogryphes marins; douze têtes de lions la font redescendre en nappe tout alentour.