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336 PROMENADE. qu'aux appartements particuliers du marquis. C'est encore une série de salons rivalisant de luxe et de faste. Dans l'un d'eux figure un remarquable portrait, celui d'une belle et noble tête de vieillard, comme on dit a l'Ambigu. L'étranger la contemple avec intérêt. — « C'est mon oncle, » dit avec respect le jeune seigneur, et le visiteur de s'incliner en signe d'hommage pour le digne ascendant d'un hôte si poli. De retour enfin dans le majestueux vestibule qui précède la sortie, le marquis prend congé du visiteur en daignant lui serrer cordialement la main. Il disparaît. — Sous l'em- pire de cette habitude que l'on contracte dans les palais ita- liens, l'étranger cherche machinalement des yeux un inten- dant quelconque, un gardien à qui il puisse remettre la gra- tification usitée ; son regard se croise avec celui d'un beau vieillard vêtu de noir et cravaté de blanc qui se lient avec déférence à la porte, prêt à l'ouvrir. Oh ! surprise ! oh ! sin- gulière coïncidence ! ce vieillard semble être l'original du portrait contemplé quelques minutes avant. L'étranger hésite et se trouble, puis, se ravisant pourtant; et fermant les yeux comme s'il eût commis un crime, il tend au vieillard sa main dans laquelle se trouve un ducat. Le ducat reste dans la main qu'il a pressée ; un sourire paterne et gracieux le remercie, et le visiteur, heureux de ne s'être pas mépris, sort non sans exhaler un soupir de soulagement. C'est étrange, disait le soir même le voyageur, en causant à San-Carlo avec un compatriote établi à Naples, c'est étrange, quelle ressemblance existe entre l'oncle du mar- quis *** et le conservateur de son musée ! A cette réflexion, qui plisse d'un sourire pénétrant les lèvres de l'interlocuteur, celui-ci riposte : « Ce n'est pas si bizarre que vous le pensez ; le conservateur et l'oncle du marquis ne font qu'un. »