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MOUVEMENT PHILOSOPHIQUE EN ALLEMAGNE. 199 pardonnes comme une aberration d'un grand esprit, furent acceptés comme des oracles, et la critique aussi bien que la poésie sembla vouloir prendre sur nos auteurs comme une tardive revanche d'Austerlitz etd'Iéna. Mais les hommes vraiment supérieurs ne pouvaient tomber dans ces exagérations puériles, et parfois odieu- ses. Et'c'est là que la popularité de Gœthe commença à s'affaiblir. ïl avait gémi des malheurs de sa patrie, mais il ne pouvait s'associer à ses colères rétrospectives. Il avait dédaigné de jouer en 1813 le rôle de Tyrtéë germa- nique ; la France et les idées françaises lui redevenaient sympathiques dès que nos armées ne couvraient plus le sol allemand, il pouvait, lui, l'un des plus grands pro- moteurs de la révolution littéraire qui avait émancipé l'Allemagne, continuer, sans craindre d'être suspect, à admirer nos chefs d'œuvre. Il le fit, bravant les clameurs de quelques esprits de dernier ordre, et là encore il donna la preuve de cette exquise justesse qui est une des qualités propres de son génie. Ce fut alors que se forma en Allemagne ce qu'on a appelé l'Ecole romantique, mot dont on a fort usé sans beaucoup le comprendre, et qui n'a point en Allemagne la signification que nous lui avons donnée chez nous. En France l'Ecole romantique est une école novatrice, qui représente la libre inspiration opposée à la tradition et à la règle. Elle correspond, dans notre histoire litté- raire, au mouvement d'affranchissement de la littérature allemande auquel Klopstock et Lessing ont attaché leur nom, et qui aboutit aux premiers essais de Goethe et de Schiller. Dans l'Allemagne du XIXe siècle au contraire, l'Ecole romantique est une école historique, une école de