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	104 LITTÉRATURE. un des inconvénients et des périls de la gloire ; ceux qui l'exagèrent la compromettent en donnant l'envie et pres- que le droit de la contester. Les chefs-d'œuvre de l'anti- quité n'y ont point échappé. Les commentateurs vantaient la beauté de ces ouvrages divins, et ils avaient raison ; mais quelquefois ils voulaient voir des beautés partout, même dans les choses les plus indifférentes, même dans des passages douteux ou mal compris. En outre, ils pré- tendaient en tirer des règles absolues pour l'art des âges modernes. De ce que l'Iliade et l'Enéide sont belles, ils concluaient qu'on ne pourrait faire désormais de beaux poèmes que sur ce patron ; Pindare et Horace devenaient pour eux les types de toute poésie lyrique, comme So- phocle de la tragédie, comme Tacite ou Thucydide de l'histoire. Je suis bien aise, Messieurs, de m'expliquer avec vous dès aujourd'hui sur ce point, pour que vous ne me rangiez pas au nombre de ces critiques étroits et exclusifs qui prétendent enfermer l'avenir dans la for- mule du passé, qui ferment arbitrairement la carrière où l'esprit humain se déploie, et, au nom des merveilles qu'il a produites, le condamnent désormais à une triste stéri- lité. Tel n'est point l'esprit qui présidera à ce cours. Vous trouverez en moi un profond respect pour l'anti- quité, pour ces vieux poètes et ces vieux penseurs qu'on admire davantage à mesure qu'on les connaît mieux, mais aussi un respect non moins grand pour les forces, pour les ressources, pour la destinée de l'esprit humain, de ces nations chrétiennes qui semblent parfois tomber ou reculer dans lenr marche vers le vrai et le bien,-mais qui à tout prendre, n'ont jamais cessé d'avancer et ne
