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398 LE GOURGUILLON AU XIII e SIÈCLE. rencontre chez soi. Une ville entièrement neuve et sans souve- nirs offre peu d'intérêt. Va-t-on à New-York par curiosité? non, on y est seulement conduit par l'attrait de faire des dollars. Je crois que le temps approche où toute couleur locale aura disparu, où la monotonie sera la reine de ce monde , et où le dessinateur ne trouvera plus à croquer le moindre lambeau de vieille muraille. Pendant que nous le pouvons encore, faisons donc quelques promenades dans nos vieux quartiers, et tâchons d'évoquer les souvenirs du passé : Lorsque je me dirige du côté Fourvières, j'éprouve un certain plaisir à gravir le Gourguillon ; j'y trouve des aspects que l'on ne rencontre pas ailleurs, un caractère sui generis, qui n'est pas un lieu commun, comme l'uniformité de la rue droite et plane. Je poursuis à la piste les blocs de granité servant de pavés ou de bornes aux maisons, et, depuis la rue des Prêtres, je soupçonne une voie romaine, passant par la rue Saint-Pierre-le-Vieux et aboutissant à la place des Minimes (1). Voici la petite place de Beauregard : mon imagination rétro- gradant au XIIIe siècle, cherche les traces de la Recluserie de la Madeleine (2), si célèbre dans l'histoire des guerres civiles entre (1) Les Romains établissaient le pavage au moyen de larges dalles irré- gulières , qu'on taillait de maaière à obtenir une juxta-position. A Lyon , où le granité est abondant, on se servait de cette roche, qui possède beaucoup de dureté. On peut encore voir une assez grande quantité de ces dalles au Gourguillon et à la montée St-Barthélemy. On remarquera celles qui servent à la construction des murs : elles ont été usées et lissées par le pas- sage des piétons. Dans les travaux faits dans le clos de la Sara, il y a trois ou quatre ans, on découvrit une voie ainsi pavée, qui tendait de Fourvières à la Place d'armes. Les propriétaires ne virent dans cette trouvaille qu'une carrière de pierres et en rejetèrent, à droite et à gauche, les blocs qui repo saient sur un remblai antique, composé de terre, de débris de marbre et de poterie. La voie était recouverte d'une couche de même nature. (2) < Il y avait des chapelles, autrefois destinées à des personnes pieu- ( ci ses, que l'on nommait reclus et recluses , parce qu'elles vivaient séparées « du monde et renfermées dans ces sortes d'oratoires Ste-Madeleine , « Ste-Marguerite étaient des recluseries de fille. » Brossette. Éloije de la ville de Lyon. 1711, p. "7.