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                          BIBLIOGRAPHIE.                            333
ont succédé à ceux de Socrate, et qui ont à étudier aujourd'hui,
à côté de l'histoire antique de leurs pères, les faits plus récents
de leur histoire rajeunie? N'a-t-il pas trouvé de nouveaux pâtres
qui gardent leurs troupeaux dans ces prairies depuis si long-
temps fertiles, et qui viennent quelquefois dormir dans les sar-
cophages brisés de leurs anciens héros, dont le vent a emporté
la poussière ? C'est là un des charmes de son livre qui ne nous
laisse jamais seul sur ce qui n'est plus, et met toujours de la vie
à côté d'une ruine, comme le soleil à côté de l'ombre.
   Il y a peu de jours que la Grèce, comme le phénix, est res-
 suscitée de sa cendre. Elle s'est souvenue enfin de son passé ;
l'écho des ruines de son Agora lui a jeté de nouveau les paroles
de Démosthène qu'elle avait oubliées -. «. Ce ne sont pas les tyrans
 qui font les tyrannies, ce sont les peuples lâches ! » L'Europe a
 applaudi à son réveil ; nous assistons chaque jour aux efforts
 qu'elle fait pour reconstituer sa nationalité. Je ne sais si l'on
 peut, sans illusion, espérer cette pleine renaissance, encore si
 lointaine, que M. Yemeniz appelle de tous ses vœux. Trop épris
 de cette noble terre, il ne peut écouter sans douleur et sans es-
 poir ces vers de Child-Harold :
  « Belle Grèce, il est de glace le cœur qui te regarde sans ressentir ce
qu'éprouve un amant penché sur les restes de celle qu'il aima ! »
                                         (Ch. ii, strophe 15).

   Tant de choses manquent aux Grecs pour être un peuple ! Mais
si cette espérance est encore vaine, notre voyageur a toujours
bien raison d'aimer ce pays qu'il vient de parcourir. Il s'identifie
à lui, il se rappelle avec amour chaque incident de sa route,
chaque débris qu'il a heurté. Son affection pour ce beau ciel
nous fait regretter qu'il ne nous ait rien dit lui-même sur l'art
antique ; nous aurions voulu l'entendre parler sur ses chefs-
d'œuvre et sa beauté. Si, trop modeste, il a laissé cette tâche
au talent de M. de Laprade, s'il s'est borné au simple rôle de
narrateur, il l'a du moins bien rempli. Il a su éviter l'écueil de
tous les voyages descriptifs, en ne faisant pas de son livre un in-
ventaire. Il raconte ce qu'il a vu, il parle d'un pays qu'il aime, et