page suivante »
f~ BIBLIOGRAPHIE. 325 térature antique, et elle dérive d'une de ses plus nobles passions, la nationalité ! Ce culte de la patrie à Rome fut quelque peu farouche : son temple fit déserter souvent celui delà Pitié ; mais Athènes sut le garder au cœur de ses enfants entre leurs senti- ments les plus tendres. Elle leur fit entourer de vénération leur berceau et les traditions de leurs pères ; elle leur apprit que l'art doit s'inspirer , avant tout, au foyer du patriotisme, sans lequel le poète, selon l'expression de Dryden, n'est plus qu'une « flamme peinte » ! De son côté, elle rendait à ses héros l'amour qu'ils avaient eu pour elle ; la poésie répondait à leur mort par l'apothéose. Et ici nous touchons encore à un sens pro- fond des fables antiques, car tout s'enchaîne dans cette belle littérature. Les nations ont deux histoires : l'histoire véritable qui raconte leur vie , l'histoire fabuleuse qui s'empare det leur imagination.Les fables ne sont que la transfiguration que l'on fait subir à un personnage pour le rendre immortel. Dans l'his- toire , les peuples conservent les personnages qu'ils ont vus ; dans la fable, ils couronnent les fronts de ceux qu'ils ont aimés ! Ce qui fait le grand charme de l'antiquité grecque, c'est cet ensemble de doctrines humaines qui se retrouve, il est vrai, au fond de toutes les littératures, mais nulle part aussi complet et surtout aussi bien formulé. Ses poètes étudient l'homme sous toutes ses faces et dans toutes les situations de sa vie. Sans de- vanciers pour leur servir de modèles, leur défaut est plutôt la simplicité que l'exagération. Ils n'avaient besoin pour être émus que des sentiments vrais et simples de la nature, et non des spectacles sanglants que Rome se prodigua, ou du raffinement et des bizarreries exceptionnelles qui sont le propre de toutes les civilisations fatiguées. Entre les passions ils choisissaient ordi- nairement les plus simples ; et, pour faire comprendre mapensée, je choisirai un dénouement fréquent au théâtre, le suicide. 11 y a deux sortes de suicide : l'un qui naît d'une fougue momenta- née qui égare l'homme, c'est le naufrage de l'énergie humaine lorsque le poids du malheur est trop fort ; l'autre qui est la con- séquence, ou de ce raisonnement de l'orgueil connu de l'antiquité sous le nom de stoïcisme, ou de cet abattement sceptique, plus