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132 MADEMOISELLE DE MAGLAND. Marie ; elle n'avait plus que deux jours à passer auprès de Sara, qui l'aidait tristement dans les préparatifs du départ. De douces pa- roles, de tendres promesses de s'écrire, de se revoir s'échangeaient entre les deux amies, quand un domestique entrant précipitam- ment annonça qu'une dame du voisinage s'étant trouvée gravement indisposée à leur porte, ses gens demandaient quelques instants d'hospitalité ; avant que Sara ait eu le temps de se rendre compte de ce qui se passait, Marie avait reconnu Alix, en apparence éva- nouie, quoique fort rouge, que ses domestiques déposèrent dans le parloir. Marie soutint cette épreuve avec plus de fermeté qu'elle-même n'eût osé l'espérer, et la satisfaction d'avoir pu triompher de ses premières impressions lui donna une exaltation qui doubla son cou- rage. Quand Alix reprit connaissance, elle put lavoir debout à quel- ques pas d'elle, les yeux secs, la considérant en silence ; sans doute elle se préparait un triomphe dans les angoisses de sa victime, peut- être s'attendait-elle à une scène de violence et de larmes, mais Marie resta calme et muette. Dans les gens accoutumés à celte ré- serve pour eux-mêmes, à ces égards pour les autres, qu'impose la bonne éducation, cette habitude d'enfance a tant de force, s'affran- chir des convenances est si impossible, que vainement on forme le projet de s'y soustraire; ainsi, malgré la tempête qui grondait sour- dement dans le cœur de Marie, elle ne fut point au-dessous d'elle- même et se contint jusqu'au bout ; elle jeta un dernier regard froid et dédaigneux sur son indigne rivale et sortit. — Mm« O'Kennely la suivit, laissant Alix aux soins de ses gens qui avaient bouleversé le paisible cottage pour secourir leur maîtresse dont l'indisposition fut de courte durée ; elle dut bientôt regagner sa voiture sans avoir revu les maîtres de la maison. Sara trouva Marie la figure cachée dans ses mains, tous les mem- bres agités de spasmes convulsifs qui semblaient devoir la briser, et jetant des cris déchirants ; elle la prit dans ses bras en s'efforçant de la calmer ; ses sages et douces consolations ne restèrent pas sans effets ; les larmes de Marie cessèrent de couler ; ses gémissements se turent, et sa douleur céda à son courage. Chez les femmes qui souffrent, la finesse divinatrice des organes triple au moins de puis-