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                               S79
nous faire voir où en était Foscolo avec la pensée reli-
gieuse. Et néanmoins, il suivait Pellico dans les temples ; et
quand il s'était mis à genoux devant Dieu, il lui venait, comme
à Jean-Jacques Rousseau, d'indicibles émotions ; et il ne pou-
vait souffrir la présence d'un homme qui avait l'impiété au
cœur, ou bien qui en affichait les apparences. Douce et forte
amitié que celle de nos deux poètes ! Ugo Foscolo est parti le
premier ; il est mort à Londres, loin du beau ciel de sa Zanle
chérie, loin de son ami, qui lui paie, dans ses Poésies inédites ,
un magnifique tribut d'éloges, espérant q u e , à son dernier
jour _ le pauvre Foscolo se sera tourné vers Dieu, car une ex-
      ,
cellente mère priait pour lui. Quand on lira maintenant les
Lettres de Jacopo Orlis, 11 faudra lire aussi les vers de Pel-
lico sur l'infortuné romancier ; on ne le connaîtrait pas à fond
sans cela.
   Pellico menait donc à Milan une vie toute littéraire , que les
joies du monde venaient embellir. Il nous a dit comment un
pouvoir ombrageux brisa tout-à-coup sa roule sous ses p a s ,
et le tint dix ans dans les cachots, après l'avoir fait passer par
les épouvantements de la mort. Aujourd'hui qu'il a été rendu
à la liberté , Pellico sait bien ce que valent de nobles illusions,
et ne se repose plus qu'en Dieu, espérant tout de lui pour sa
patrie comme pour le monde. Catholique sincère, chrétien
pieux et humble , il achève son pèlerinage, donnant une part
à la prière , une autre part aux livres et à l'amitié. « Où est ma
« jeunesse, dit-il ? Où sont les douces années d'amour que je
« passai aux rives du Rhône? Où esl, l'heure du retour à mes
« pénates chéris, et l'époque de mon retour aux riantes con-
« trées des Insubriens ? Où sont les nobles poètes q u i , à M i -
« l a n , me ceignaient le front de laurier ? Où est ma gloire
« applaudie sur la scène? Où sont ces deux lustres passés dans
« les fers ?
  « Bien des fois je vais posant sur des livres poudreux ma
« tremblante main , et je les ouvre, et il me semble que me
» voilà revenu aux jours studieux de ma jeunesse, et les lar-