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BIBLIOGRAPHIE. FABLES EN PATOIS BUGESIEN, par le PÈRE FROMENT. Nantua, Auguste Arène, 1860. — MIRÈÃO, poème provençal, par Frédéric MISTRAL, avec la tra- duction littérale en regard. — TOME IV DES MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ D'HISTOIRE ET D'ARCHÉOLOGIE DE CHALON-SUR-SAÔNE. Chalon, 1860, in-4°. — LE ROMAN DE TOINETTE, par Tholo. Lyon, 1861, in-12. Laissant à de plus habiles les phrases obligées sur les avantages de la décentralisation littéraire, nous nous bornerons à constater que jamais les études et les recherches locales n'ont été plus en honneur qu'aujourd'hui. Aussi, ne devons-nous pas nous étonner de voir les dialectes populaires échapper à leur oubli prochain dans l'unité du langage, en se fixant à titre de curiosité ou de, fantaisie dans des livres nouveaux. Ces livres, hors de la province où ils peuvent être lus dans l'original, perdent une grande partie de leur mérite ; la traduction ne saurait en offrir qu'un daguerréo- type sans relief et sans couleur : mais la linguistique y puise d'utiles ren- seignements, et l'ethnographie y trouve l'occasion de s'enrichir de nou- velles découvertes sur les origines et les déplacements des habitants pri- mitifs. Aussi sommes-nous disposé à faire bon accueil aux fables publiées en patois bugesien, sous le couvert pseiulonymique du Père Froment. Ces fables, pour la plupart, sont imitées de Lafontaine : nous devons avouer qu'il a fallu à l'auteur un certain courage pour paraphraser ces charmants petits récits qui resteront la perfection du genre. Aussi les trouvons-nous xm peu dénaturés ; nous ne reconnaissons pas tout à fait l'adorable naïveté du bonhomme dans le recueil bugesien ; mais nous y rencontrons en plus la malice du vieux paysan doublée de celle du fonctionnaire en vacances. Toutes les fables ne sont pas imitées : les femmes de Poncin ont, par exemple, l'honneur d'un conte original à leur adresse ; plaisons-nous à reconnaître que leur caractère ne doit pas être aussi méchant et aussi aca- riâtre que veut bien le dire le Père Froment, car il aurait été infaillible- ment lapide par elles pour la moitié du mal qu'il en dit, s'il était vrai. Pour ne pas en finir sur une mauvaise chicane, disons bien vite que nous avons remarqué une charmante fable intitulée : la Fourmi et l'Abeille- C'est la contre-partie de la conclusion égoïste que l'on peut tirer de celle qui précède, la Cigale et la Fourmi. L'enfant est égoïste et personnel ; il n'est que trop disposé à rire de la cigale que l'on envoie danser ; appre- nons-lui donc à donner,commc l'abeille qui secourt généreusement la fourmi devenue à son tour nécessiteuse. L'idée est morale et charmante à la fois. — Voici un ravissant poème en langue d'oc : ce n'est plus seulement ici un dialecte populaire, c'est une langue consacrée par les chants des troubadours, et féconde, encore aujourd'hui, eu brillantes conceptions. Si vous voulez quitter un instant les bruines lyonnaises et laisser errer votre esprit charmé au pays du soleil, ouvrez ces pages imprégnées des plus enivrantes senteurs méridionales. Vous y trouverez la touchante histoire de Mireille, la vierge provençale martyre de l'amour. Elle s'épanouissait, fleur ingénue, à l'ombre des micocouliers abritant le mus paternel, lorsque le hasard amena auprès d'elle Vincent, le fils du vannier. Ce cÅ“ur de jeune fille s'émut pour la première fois eu écoutant les merveilleuses histoires que racontait l'ouvrier, traditions, légendes, récits colorés de sa vie no- made. Oh ! les charmantes idylles qui suivent ces premières impressions ! Regardez-les tous les deux sur le même mûrier, à la cueillette des feuilles : comme leurs mains se rencontrent, toujours sans se chercher, dans le panier à moitié plein ! Et quel tressaillement, à ce premier aveu qui tombe des lèvres de la jeune fille, comme une échappée du soleil de mai. — « Vincent, veux-tu le savoir? Vincent, je suis amoureuse de toi ! » Aussi, quand ii