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210                     PATOIS DU LYONNAIS.

 peuple, dont il dit les misères avec un sentiment profond
 et les accents d'un vrai poète. Le poème de Mireio a donné
 a la Provence son épopée, en réunissant dans un cadre har-
 monieux la peinture de ses travaux, de ses habitants, de sa
 terre et de son ciel, avec le récit de ses traditions reli-
 gieuses et des époques héroïques de son histoire.
    L'étude des patois serait donc intéressante même pour la
 littérature. Mais c'est surtout pour l'archéologie et l'histoire
 nationale qu'elle a son importance.
    Je ne parle pas seulement des secours qu'elle peut donner
 pour l'intelligence des monuments écrits du moyen âge.
 L'abbé Grégoire lui-même lui reconnaissait cette utilité.
 Ma pensée est plus générale.
    « Une langue, c'est la forme apparente et visible de
 « l'esprit d'un peuple, » dit la préface du Dictionnaire de
 l'Académie française (1).
    Cette parole d'un grand'écrivain, le style c'est l'hpmme,
vraie des individus, est vraie aussi des peuples et des
 siècles.
    De tous les caractères des nationalités il en est peu d'aussi
significatifs que la langue. De plus, chaque époque d'une
mâme nation a son style, sa langue appropriée a son état
de civilisation. 11 ne serait pas difficile de faire cette dé-
monstration pour notre pays. La langue vive, aggressive,
railleuse du XVIe siècle n'est-elle pas la langue propre des
jours de la Réforme? La langue correcte, a la fois claire et
ferme du XVIIe, ne caractérise-t-elle pas l'époque de l'apo-
gée de la monarchie française telle que les siècles l'avaient
constituée? Cette langue n'est déjà plus la nôtre; les écri-
vains du grand siècle ne peuvent plus se lire sans un com-
mentaire : et que de points de comparaison, hélas ! entre la

  (1) Edition de 1835, p. 18.