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208 FAVRE, VAUGELA.S. Pour en obtenir le pardon, Vous direz que je fais un don Aussi honteux que mon remède : Mais rien ne paroît précieux Auprès de l'Ange qui possède Toutes les richesses des Cieux ! C'était de la primcesse qu'il entendait parler. Il fut gouverneur (1), sur la fin de sa vie, des enfants du prince Thomas de Carignan, dont l'un était sourd et muet, et l'autre bègue. « Quelle destinée, disait M. Ram- bouillet, pour un homme qui parle si bien et peut si bien apprendre à parler, qu'être gouverneur de sourds et muets ! » Tallemant (2) dit que ce fut Mme de Carignan « qui fit mourir ce pauvre M. de Vaugelas à force de le tourmenter et de l'obliger à se tenir debout et décou- vert. » Quand Vaugelas était à Paris, il allait tous les jours à l'hôtel de Rambouillet; il y débitait des nouvelles, « où il n'y avoit aucune apparence, et il croyoit quasi tout ce qu'il entendoit dire. » Il était plein de candeur, surtout attentif aux formes du langage, aux mots bien plus qu'aux choses ; gentilhomme d'ailleurs de belle apparence, de bonne mine, fort dévot, civil et respectueux jusqu'à l'excès, particulièrement • envers les dames ; craignant toujours d'offenser quelqu'un, circonspect dans les dis- putes; — tout à son procès-verbal élégant et per- pétuel. En ses dernières années, il était devenu le grand tra- vailleur, la cheville ouvrière de l'Académie, celui qui tenait la plume pour le Dictionnaire, et qui avait la con- (1) Sainte-Beuve. Nouveaux lundis, VI. 344, (2) Historiettes de Tallemant des Réaux. Paris, 1864, ouvrage où l'on trouve une foule d'anecdotes curieuses, mais trop de cynisme.