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DU CHEVALIER DE BOUFFLERS. 313
le compte d'une femme quelconque, de la première qu'il vous
plaira de compromettre par un mot ambigu, par une allusion
volontaire ou non, le crime imaginaire que vous prêtez à la pau-
vre laitière. Et quand je songe que c'est moi... moi, comtesse de
Larcy, qui suis cette petite malheureuse, cette soi-disant victime
de votre jolie figure et de vos belles manières ; quand je pense
qu'un jour, aujourd'hui peut-être, vous pourriez me reconnaître,
oh ! je frémis rien que d'y songer. Votre vanité blessée, votre
amour-propre de poète mis en jeu et forcé de soutenir par tous
les moyens les mensonges de votre plume, sons peine de voir les
rieurs se tourner contre vous, à quelles extrémités cette néces-
sité ne vous eût-elle pas poussé ? Je serais perdue, je ne puis
en douter, je serais déshonorée .'
SCÈNE IV.
LA COMTESSE, BOUFFLERS.
UN DOMESTIQUE (annonçant). Monsieur le chevalier de Bouf-
flers.
LA COMTESSE. 0 ciel, quel contretemps... le marquis sera ar-
rivé trop tard.
(Boufflers s'avance et salue avec le plus profond respect la com-
tesse qui paraît agitée et contrainte.)
BOUFFLERS. I! m'est aisé, madame, devoir que j'arrive mal Ã
propos. Je pensais trouver le marquis ici, il devait me servir
d'introducteur auprès de vous.
LA COMTESSE. Il est vrai, chevalier, mais un malentendu que je
regrette... Je ne sais comment vous expliquer...
BOUFFLERS. Je n'ai besoin d'aucune explication; du moment
que je suis importun, c'est moi qui suis en faute.... Permettez
que je me retire.
LA COMTESSE. ( Voyant que Boufflers ne la reconnaît pas, Ã
part.) Il ne me reconnaît pas ; en effet, quelle vraisemblance...
Un an écoulé, il m'a si peu vue, et puis ce costume. Le renvoyer,
n'est-ce pas lui donner des soupçons? (Haut.) Vous me désobli-
geriez, chevalier, en abrégeant votre visite; veuillez vous asseoir.
BOUFFLERS. Vous n'ignorez pas, madame, que le marquis est