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Trimourli indien qui irône sur l'univers et qui circule dans
toutes les veines de la création : Siva n'a pas plutôt détruit
une forme qu'il en produit une autre. Euripide, Aristophane,
Socratc firent bien de douter, puisque les conditions de la foi
n'existaient plus pour eux; la légion philosophique qui les suivit
lit bien de broyer toutes les idoles sous ses pas, de joncher la
terre des débris de tous les temples, au point que quand elle
eut passé, une voix s'écria du fond du sanctuaire oriental :
« Les dieux s'en vont. » Montesquieu, Rousseau, Voltaire
firent bien de s'attaquer aux institutions de leur temps puis-
qu'ils ne les croyaient ni justes ni bonnes et que le soude de
la vie s'était retiré d'elles. Oui, ils firent bien. Aussi, après
le grand scepticisme ancien, les dieux n'avaient pas péri, mais
ils vivaient plus radieux que jamais ; après le grand scepticisme
moderne, la société bouleversée jusqu'au fond de ses entrailles
ne mourut pas non plus : elle ne fit que subir une éblouissante
transfiguration.
   11 m'arrive quelquefois de comparer les agitations du doute
aux tempêtes, aux pluies et aux frimais dont le monde exté-
rieur est le théâtre, et l'état de foi au temps calme et serein
qui ne manque jamais de les suivre. Quand les nuées s'amon-
cèlenl et se condensent en noirs tourbillons, et que la pluie
s'échappe par torrent de leurs flancs entr'ouverts, quand la
terre est toute couverte de neige, que le soleil perdu dans le
firmament ne lui envoie pas môme quelques ternes rayons, et
que le vent soufle dans les arbres dépouillés, on dirait que
l'atmosphère lourde et grisâtre qui enveloppe alors la mou-
rante nature va lui servir de suaire, et pourtant ces pluies,
ces frimais, celte atmosphère pesante sont précisémentee qui su-
rexcitera en elle les développements de la vie. Lorsque pluies
et frimais ont passé, la végétation prend une vigueur nouvelle,
et vous vous promenez avec plus de délices qu'avant leur venue
dans les forêls chantantes, vous enivrant des gazouillements des