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butent ordinairement dans la carrière par rêver de la mé-
taphysique ludesque ; ils deviennent les correspondants assi-
dus de ces doctes nébuleux d'outre Rhin qui, se couronnant
dans leurs ténèbres, et dans l'orgueil de leur nullité m é -
ditative, cherchent, au fond d'un pot de bière et dans la
fumée de leur pipe, le dernier mot du problème social et
religieux. Ceux-là passent dans un certain monde pour des
êtres très profonds. Plus tard, si la foi se manifeste chez le
néo-chrétien sous forme de poème ou de feuilleton, il adopte au
nom de Y art (ce mol dans sa bouche a toujours dix syllabes),
le rôle de procureur du roi contre l'époque ; il n'est sorte
d'analhômes et d'excommunications dont il ne frappe le XIX e
siècle et ses artistes. Don Quichotte de toutes les madones et de
tous les saints de carrefours, il tombe en extase devant la moin-
dre pierre sculptée, et se crée un moyen-âge de fantaisie dans
lequel tout ce qui est cathédrale ou monastère est toujours ogive,
fût-il duX e ou du XIe siècle.Grâce à cette érudition archéologi-
que, il se fait nommer, lorsqu'il ne se nomme pas lui-même,
inspecteur des monuments historiques de son déparlement.
Très fort sur la liturgie, il en remontre à l'archevêque de son
diocèse, et, au besoin, ferait la leçon même au collège des
rils. Il jette un regard de dédain sur les journaux frivoles,
sur les livres frivoles, méprise les conversations frivoles, et
tout ce qui demande du talent véritable et de l'esprit argent
comptant. Repu de la lecture des Prophètes et du Penta-
teuque, apocalyptique dans toutes ses conceptions, il erre sans
cesse sur les bords du Cédron ou la cîme du Golgolha ; à g e -
noux, la tête couverte de cendres, il invoque Jehova, supplie
Eloïm le Dieu des armées, et déplore la ruine de l'arche
sainte et de la maison d'Israël ; c'est à croire qu'il se flagelle et
porte le cilice ; mais tout cet étalage est une aflaire de pa-
rade qui n'a de durée que le temps qu'il pose en public.
C'est un apôtre qu'on rencontre aussi souvent au théâtre