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 aux poètes les plus difficiles1, qu'il embrassa vivement. Ce
 goût, cette science des poètes, se mêla passionnément à
 sa botanique, et devint comme un chant perpétuel avec
 lequel il accompagnait ses courses vagabondes. Il errait
tout le jour par les bois et les campagnes, herborisant,
 récitant aux vents des vers latins dont il s'enchantait,
 véritable magie qui endormait ses douleurs. Au retour,
le savant reparaissait, et il rangeait les plantes, cueillies
 avec leurs racines, dans un petit jardin, observant l'ordre
 des familles naturelles. Ces années de o/j, à gy furent toutes
poétiques, comme celles qui avaient précédé avaient été
principalement adonnées à la géométrie et aux mathéma-
tiques. Nous le verrons bientôt revenir à ces dernières
sciences, y joignant physique et chimie; puis passer pres-
que exclusivement, pour de longues années, à l'idéologie,
à la métaphysique, jusqu'à ce que la physique, en 1820,
le ressaisisse tout d'un coup et pour sa gloire : singulière
alternance de facultés et de produits dans cette intelli-
gence féconde qui s'enrichit et se bouleverse, se retrouve
et s'accroît incessamment.
    Celui q u i , à dix-huit ans, avait lu la Mécanique ana-
lytique de Lagrange, récitait donc à vingt ans les poètes,
se berçait du rhythme latin, y mêlait l'idiome toscan, et
s'esssayait même à composer des vers dans cette dernière
langue. Il entamait aussi le grec. Il y a une description
célèbre du cheval chez Homère, Virgile et le Tasse (1):
il aimait à la réciter successivement dans les trois langues.
    Le sentiment de la nature vivante et champêtre lui

   [i) Homère , Iliade VI; Virgile, Enéide XI; et le Tasse, probablement Jé-
rusalem délivrée , cliaat IX , lorsqu'Argilan, libre enfin de sa prison , est
comparé aa coursier belliqueux qui rompt ses liens.