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i44                           BIBLIOGRAPHIE

cette étymologie puisque sur leurs monnaies et leurs poteries ils ont
fait entrer l'image du corbeau : c'est là le terrain archéologique.
  M. Devaux se place sur le terrain philologique. Pour lui le celtique
Lugu (duniim) dont les deux u sont longs ne peut avoir de rapports avec
le grec Lougos ; de plus l'auteur qu'on nomme le pseudo-Plutarque ne
mérite aucune confiance à cause de ses fables et de sa crédulité exces-
sive ; en troisième lieu si les oiseaux servent à former parfois les noms
de lieux, les noms de divinités font bien plus souvent cet office. Enfin,
M. Devaux ne peut pas nier que les Gallo-Romains de Lugdunum
aient fait graver ou peindre l'image du corbeau sur des pièces officielles,
mais il répond de deux façons : i° Cela ne prouve en rien la réalité de
l'étvmologie colline des corbeaux, parce que les Gallo-Romains ont pu
parfaitement accepter, bien à tort, comme vraie, une étymologie fausse
en elle-même, comme le vulgaire en accepte encore souvent de nos
jours ; 2° il n'est point prouvé que le corbeau des monnaies de Lugdu-
num fasse allusion à l'étymologie ; le contraire même pourrait être vrai;
on aurait fabriqué l'étymologie pour expliquer le corbeau. Il ne serait
pas admissible de prétendre que le nom de Lyon vient du mot lion parce
que les armes actuelles de notre ville portent l'effigie d'un lion ; des
ignorants pourraient peut-être s'y tromper, mais cela ne tirerait pas à
conséquence pour la véracité de l'étymologie.
  Pour M. Devaux, Lugdunum représente la colline du dieu Lug; il est
assez probable, sans que ce soit certain, que Lug est le Mercure gaulois.
Le nom de cette divinité ne s'est point encore rencontré isolé, mais on
le trouve dans des noms composés et il est très réel.
  Voilà, exposé sommairement, mais aussi clairement que j'ai pu le
faire le sujet de la discussion élevée entre les deux érudits : l'un se plaçant
au point de vue archéologique, l'autre faisant surtout appel à la philolo-
gie. Les deux champions sont de bonne foi : aucun ne paraît avoir été
convaincu par les arguments de son adversaire.
  Attendons-nous à ce que d'autres savants viennent à la rescousse : ce
sera tant mieux si leurs efforts arrivent à donner une solution définitive
à l'épineuse question.


                                                         J.-B. MARTIN.