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54 TRAITRE OU HÉROS ? Épaulant alors vivement le fusil dont il venait de se saisir et en dirigeant le canon sur le bandit : —«Ephisio Malipierri, lui cria-l-il d'un accent qui retentit dans la solitude, AU NOM DU ROI , tu es mon prisonnier ! Pas un mouvement, ou tu es mort ! » Ephisio s'était relevé soudain et restait immobile. Sa figure était devenue livide et ses yeux injectés de sang laissaient échapper ces lueurs phosphorescentes et sinistres que projette l'œil du lion frappé à mort et dont le chasseur le plus intré- pide ne peut soutenir l'éclair sans terreur. —• « Respecte le nom du roi, répondit-il d'une voix qu'on eût dit un rugissement étouffé, et ne le souille pas en en couvrant ta trahison ! Quant au tien, lâche, je ne le l'ai pas demandé avant de t'ouvrir ma retraite. Celte retraite qu'aucun de les pareils n'eût osé me disputer les armes à la main, je te l'ai ouverte, je te l'ai livrée en t'appelant du nom dont Abel appela Gain, je t'y ai reçu en frère... » Ulloa tressaillit et voulut parler. — « Pas un mouvement à ton tour, pas un mot, reprit Ephisio, avant de m'avoir entendu jusqu'au bout !.. Je t'y ai reçu en frère et n'ai pas usé d'un antre nom envers toi. . Que celui qui maudit Caïn et le marqua au front soit ton juge ! je t'abandonne à lui. Mais en violant les devoirs de l'hospitalité lu m'en affranchis moi-môme: elle me défen- dait de demander le nom de mon hôte, tu me donnes le droit d'exiger celui de mon meurtrier. Que je sache donc quel nom lu as à jamais flétri' en le portant. Ton nom ! misérable! ton nom ! que je puisse te le clouer au front cou- vert de toute sa honte et le vouer au mépris qui s'attachera à lui désormais ! — « Salvador Ulloa, chevau-léger du roi, répondit le soldat avec fermeté, Salvador Ulloa qui n'a jamais versé le sang innocent, mais qui a juré de venger celui que tu as