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I9O DEUX MOIS EN ESPAGNE primitive. Il n'y a pas jusqu'à ces deux grands bassins de pierre, et les fontaines qui les alimentent, qui, isolés par toute cette verdure des jardins abandonnés à eux-mêmes, et ces arceaux des cloîtres vermoulus et garnis de mousse, ne prennent un caractère étrange et religieux, en refléchis- sant dans leurs eaux limpides les dentelles de pierres des galeries et les gargouilles qui grimacent autour des clochers qui les dominent. A côté de la cathédrale des rois d'Arragon se trouvent leurs célèbres archives, conservées dans un petit monument gothique dont l'escalier exciterait l'admiration, si elle n'a- vait pas été épuisée dans l'église. Là , dans de vastes salles parfaitement arrangées, sont d'énormes dépôts de manus- crits, classés et numérotés avec soin, qui s'offrent d'eux- mêmes aux recherches des érudits. Cette immense collection, célèbre dans le monde savant à cause de ses énormes richesses, contient, à partir de l'an 844, tous les documents des royaumes d'Arragon, de Mayorque, de Valence et de la Catalogne; tout y a été conservé, jusqu'aux moindres choses : les invitations de chasse des souverains, par exemple. Barcelonne peut donc y suivre tout son passé, jusque dans ses détails les plus minimes. La Provence y est, dit-on, aussi intéressée par un grand nombre de pièces; après y avoir admiré de char- mantes miniatures du moyen-âge, des autographes très- rares, des écritures mauresques, etc., je me hâtai de m'en arracher, car je n'avais que bien peu de temps pour par- courir l'Espagne, et devais éviter de m'oublier dans les recherches que j'étais si tenté de faire dans ses archives, jusqu'à présent peu explorées. Je pris dès le lendemain matin le bateau à vapeur, et m'empressai de partir pour Valence. (A suivre). L E MARQUIS DE P***