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               CHRONIQUE LOCALE


  — Encore un printemps de raté.
   Je ne sais si, ce mot est dans le Dictionnaire de l'Acadé-
mie, mais il rend ma pensée et je le laisse.
   Et pourquoi n'y serait-il pas ?
   La langue est-èlle faite pour le dictionnaire ou le diction-
naire pour la langue ?
   Quand un mot a du chic et qu'il rend d'un trait la pensée,
pourquoi le proscrire ?
   Les meilleurs officiers de l'armée ottomane ne sont-ils pas
des étrangers ?
   N'ont-ils pas été chrétiens ?
   Et pour cela, se prive-t-on de leurs services ?
   Non certes ! on leur offre tous les emplois, à la seule con-
dition de les bien remplir.
  Ainsi des mots.
  Zouave est arabe, Vagon est anglais, Omnibus est latin,
Philosophe est grec ; il fut un temps où l'Académie ne s'en
servait pas. Fi donc ! Je voudrais savoir comment aujourd'hui
on pourrait s'en passer.
   Et Tramways f Le mot sera-t-il dédaigné comme la chose ?
Et encore, à Paris, on s'en sert parfaitement, mot et chose,
et quel Académicien ne les a pas employés tous deux ?
   On dit d'ailleurs que la nouvelle édition du Dictionnaire
des Immortels a ouvert largement ses portes et qu'une foule
d'étrangers ou de dédaignés a fait irruption à côté des vieux
mots dont se servaient Corneille et Bossuet.Tant mieux pour
tout le monde, car on n'aime pas, quand on écrit, à entendre
dire : « Tiens, ce Monsieur ne parle pas français. »
  Eh bien ! parler français ne dépend-il pas complètement
des lieux ou du siècle où on vit ?
   Parle-t-on français à Paris comme en Suisse, en Belgique
ou dans le Canada ? Parle-t-on en 1878 comme en 1500, en
1600, en 1700 ? et s'y fait-on, s'y faisait-on comprendre ? Ces
siècles ou ces pays avaient-ils des poètes et des prosateurs,
des hommes d'esprit, des femmes aimables, des puristes,
et môme des gens d'un goût difficile ?
   Je gage que si le spirituel écrivain qui, sous le nom d'un
Ancien de Lyon, fait, dans le Courrier, de si intéressantes
dissertations sur quelques mots réputés hérétiques et lyon-
nais, c'est-à-dire bons au feu, était jamais reçu membre de
l'Académie française, il n'aurait rien de plus pressé que de
faire reconnaître comme descendus du latin ou du gaulois,