page suivante »
HISTOIRE D'UNE PENDULE 461 chaise de paille, haletant à faire pitié: son feu était éteint. Des provisions, auxquelles elle n'avait pas touché étaient éparses sur une table encombrée d'objets divers souillés par la poussière. A ses yeux, à l'amincissement de son nez, je vis qu'elle touchait à ses derniers moments. — Vite, allez chercher M. le curé et le docteur, dis- je à la voisine qui m'avait suivie, je reste là . — Oui, dit la mourante, avec effort, le curé : mais le docteur c'est inutile. — Allez toujours, répétai-je, car je pensai : au moins faut-il savoir de quoi meurt la pauvre femme, quoique je m'en doutasse bien. Je couchai la malade, en ayant soin de lui tenir la tête élevée à cause de son oppression. La voisine rentra avec le docteur. Quant au curé, il était allé porter le viatique dans un hameau assez éloigné de notre bourg. On devait l'avertir dès son retour. ' Le docteur s'approcha de Jeanne, lui tâta le pouls, puis s'éloignant d'elle, il me dit: —• Cette femme ne passera pas la nuit : elle a une phthisie galopante au dernier degré. Le chagrin, la mi- sère, la faiblesse de sa constitution ont fait à la fois leur œuvre. Puis il se retira. La voisine s'en alla aussi pour donner • la soupe à ses petits enfants et les coucha. Elle me pro- mit de ne guère tarder à revenir. Quant à Pierre, on ne savait où le prendre. Je demeurai donc seule avec la mourante. Ah ! ce fut une triste veillée, allez, triste et froide. Je tâchai de ranimer le feu avec quelques pauvres petits morceaux de bois gisant sur la terre qui servait de plancher à cette misérable demeure, mais il s'éteignit bientôt de