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524 CHRONIQUE THÉÂTRALE. ner prendre définitivement sa place. Ce serait bien le moment d'essayer, en passant, l'appréciation de tous nos artistes lyriques. Nous céderions volontiers à la tentation,- mais, l'espace aujour- d'hui faisant défaut, force nous est de remettre ce plaisir à la prochaine nouveauté qui sera jouée. Aux Célestins, M. Hyacinthe a succédé à M. Lassagne et à M. Félix. Les petits journaux ont tellement abusé de la per- mission de faire des plaisanteries sur le nez de cet estimable artiste qu'à son entrée en scène nous nous attendions, n'ayant jamais eu la bonne fortune de voir cet acteur , à quelque chose d'exorbitant et de complètement déclassé. L'épigramme de l'an- thologie grecque nous revenait à la mémoire : « Proclus ne peut pas moucher son nez avec sa main ; car il a la main plus courte que le nez; et quand il éternue, il ne dit pas que : Jupiter me garde ; il ne s'entend pas éternuer ; car son nez est trop loin de son oreille. » Quelle n'a pas été notre surprise en ne retrouvant sur le visage de M. Hyacinthe aucune trace d'aberration rhino-plastique bien prononcée ! C'est un acteur qui ressemble à peu près à tout le monde et qui nous parait avoir recueilli une partie de la succession d'Arnal. M. Hyacinthe n'est pas que burlesque; il joue avec esprit, finesse, légèreté ; il apporte dans la composition de ses rôles ce soin des détails, cette attention aux moindres choses qui est le propre des ar- tistes parisiens. D'autres de ses confrères ont un relief comi- que plus violent, plus débraillé, plus hardi;ils n'appréhendent point de toucher aux bouffonneries fangeuses ; les éclaboussu- res de leur rire vous atteignent parfois comme de la boue. Mais ont-ils pour cela plus de talent ? C'est au lecteur à en décider. J. T.