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M. DE MIRECOURT. 419 M. Murger a été un instant en tête de cette phalange qui encombre les petits journaux; M. de Mirecourt s'est mis à la remorque. Voici quelques exemples de ce genre de style qui commence a l'hôtel de Rambouillet et finit au journal le Tin- tamarre : « Proudlion mangea le pain de l'envie et but à la coupe « de l'aigreur. » (Proudhon, 20.) « Janin patauge dans Tacite, cabriole à côté de Juvénal, « danse sur une page de Suétone, prend pour balancier un « vers de Virgile et joue au ballon avec deux ou trois hémis- « tiches du père Horace. » (Janin, 11.) « M. Thiers, devenu poisson dynastique, se mit à nager « avec grâce et a suivre le courant de la faveur ministérielle. « Il narguait les brochets de la gauche et faisait pâmer d'aise « toutes les carpes du centre. On le voyait en pleine ri- « vière, au juste milieu des flots, glisser, tournoyer, bondir « loin des herbes traînantes de l'Italie et des roseaux plain- « tifs de la Pologne, les fuyant au moyen des nageoires mo- « biles du paradoxe, et y laissant empêtrés les goujons cré- « dules du National ! « Hélas ! ce n'était plus pour eux que brillaient les écailles « argentées de son éloquence! » (Thiers, 54.) Je cite pour mémoire cette phrase : « Emile de Girardin « danse sans le moindre balancier sur la corde raide du « journalisme. » (Girardin, 38.) Et celle-ci : « M. Thiers « prend le balancier de l'histoire pour danser sur la corde « du roman. » (Thiers, 33.) Cette locution est l'a b c du genre et se retrouve a toutes les pages. Mais je dois faire connaître un passage qui donne un aperçu des procédés du style métaphorique et qui explique comment ceux qui l'em- ploient parviennent à écrire cent pages qui pourraient se ré- duire a dix si l'on en extrayait seulement les faits : « Proudhon se grise avec ses phrases, il s'enivre avec ses