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494                   MUSIQUE DPAMAT1QUE.

 gligé ; il mériterait cependant, ce me semble, d'y occuper
 une place importante. — Le récitatif est susceptible, comme
 les Å“uvres de Tartini et le Rigolelto ds Verdi le prouvent,
 de s'élever à des effets dramatiques très-puissants, de séduire
 les spectateurs et de les entraîner par des gradations infinies
jusqu'aux derniers termes de la passion -, il peut faire vibrer
 les fibres les plus cachées du cœur humain et en dévoiler le
 secret. Les cavatines, par contre, n'en peuvent donner que le
 résultat. Le récitatif pourrait parfois remplacer les cavatines
souvent insipides et se perfectionner à leurs dépens; il pourrai!
 surtout remplacer cette monotonie d'éternelles et vulgaires
cadences, qui sont comme une espèce de fatalité musicale. Et
il faudrait aussi défendre aux chanteurs, du moins jusqu'à ce
qu'ils soient plus instruits et plus philosophes qu'ils ne le
sont aujourd'hui, ces fioritures, ces gorgheggi, ces trilles qui
brisent souvent l'émotion pour la transformer en une froide
et intempestive admiration pour un organe privi'é lé; il fau-
drait également, lorsque la raison historique et l'esthétique
de la conception qui forment l'argument du drame le récla-
ment, étendre les proportions de temps, et alors l'opéra, ayant
un but moral bien déterminé, ne paraîtrait plus trop long à
l'universalité des spectateurs.
   Quand la poésie et la musique se rapprocheront et mar-
cheront ensemble vers un but social, le génie, animé par la
conscience de la fin et par la grandeur des moyens, s'élèvera
à des régions inexplorées, tirera de l'art des secrets inconnus
jusqu'ici, répandra sur des mélodies raphaélesques, a l'aide
d'une harmonie large et continue, une ombre de cet infini
auquel aspire l'humanité; résoudra le problème de la lutte
qui se livre depuis des milliers d'années entre le bien et le
mal, l'esprit et la matière, le ciel et l'enfer, symbolisée par-
fois par Meyerbeer avec des touches à la Michel-Ange, dans
un opéra qui servira longtemps d'étude aux artistes, et, se