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PEINTRE LYONNAIS 193 comme des manteaux de roi. Voilà des vaches, des chèvres couchées avec la même nonchalance que leurs gardiens. Une jeune fille remplit sa fiaschetta à une fontaine rustique. Un contadino porte son faraiolo sur l'épaule, suivant l'usage accoutumé. A côté, un rude gaillard, assis sur des gradins, la main appuyée sur un bâton, le chapeau pointu sur les yeux, attire l'attention par sa fière tournure. C'est l'Italien poétisé. On peut le comparer aux plus belles figures de Léopold Robert. Mais voici des croquis d'un autre genre. Pour bien en apprécier l'exactitude, il faudrait avoir habité Rome et sur- tout fréquenté ses nombreuses églises. Le laisser-aller n'y est guère moindre que sur la place publique. Ces groupes de peuple sont mêlés de religieux. L'un de ceux-ci est prosterné, l'autre appuyé contre une colonne. Un officiant se rend à l'autel. Un moine, entouré de ses acolytes, lit l'évangile. On comprend tout ce que ces scènes offraient de curieux modèles. Sans vouloir accorder à ces croquis plus d'importance qu'ils n'en méritent, nous croyons que cette moisson, recueillie au jour le jour, fut très fructueuse pour Dumas. C'est ainsi qu'il s'est exercé à dessiner vite, à saisir une attitude au vol, pour ainsi dire, pour la fixer instantané- ment sur le papier, en la dépouillant cependant de certaines trivialités^ Ce genre d'études exige une prodigieuse facilité et une grande sûreté de main, la naïveté et la science. Ces études ne seraient plus possibles aujourd'hui. Avec le nouvel état de choses, Rome est devenue une ville comme toutes les autres. Les chemins de fer, le gaz, les omnibus, il n'est pas besoin d'aller si loin pour en voir. Adieu les modèles involontaires. Adieu même les modèles de profession. N° 3. — Septembre 1886. I?