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                         L'ESTÉREL                        ^7

 douleurs dont mon compagnon et moi fûmes saisis, consé-
 quence certaine de l'humidité dont les fourrés étaient im-
 prégnés ; nous dûmes donc rentrer à Cannes et remettre à
 plus tard notre projet d'excursion, lorsque la saison plus
 avancée nous le permettrait sa,ns imprudence. Aussi ne
 conseillerai-je jamais d'entreprendre une course de cette
nature avant que les jours, plus longs, n'offrent un sol
moins mouillé et une rosée en partie dissipée par les rayons
du soleil.
    Effectivement, au 14 mars de cette année, après
 avoir recruté un troisième compagnon, peintre distingué
de nos amis, nous nous mîmes en route dans les mêmes
conditions d'approvisionnement qu'au mois de janvier;
mais nous suivîmes une voie plus facile et par un soleil
plus chaud qui nous favorisa de sa bienfaisante influence,
sans cependant nous accabler de sa chaleur.
    Ce n'est pas sans fatigue que l'on arrive au fond de ces
abîmes ; il faut avoir bon pied et bon œil, et surtout de
bons souliers ferrés bien solides.
    A une centaine de mètres plus loin que la première
fois, nous entrions dans un sentier à peu près praticable.
Cette gorge, couverte d'arbres verts et de grandes bruyè-
res hautes de 2 à 3 mètres, en pleines fleurs dans ce mo-
ment, est une des plus ravissantes choses que l'on puisse
voir. Beaucoup d'autres fleurs viennent mêler leurs vives
couleurs aux panaches blancs dont sont surchargés ces
groupes d'élégantes bruyères, que nous serions heureux
de voir fleurir dans nos serres ; mais cet arbrisseau, si
abondant dans ces gorges arides, ses refuse à la culture ;
il est comme tous les êtres sauvages, qui meurent de lan-
gueur du moment où ils ne sont plus en liberté et qui pré-
fèrent au sybaritisme de la civilisation des jardins toutes
les intempéries auxquelles ils sont exposés dans leurs
agrestes résidences.