page suivante »
LES CHARLATANS. 289 Cet utile problème est facile à résoudre : Prenez jaune d'œuf cuit, maïs réduit en poudre, ' Et colorez le tout avec de l'ocre brun : Ensuite, pour le nom, vous faites un emprunt A quelque mot ronflant de la langue sonore Des pays situés du côté de l'aurore. Les Mille et une nuits aideront au travail : Voilà l'alathaïm qui nous vient du sérail, (1) Le sirop de nafé, la revalente exquise, L'onctueux racahout et mainte gourmandise, Dont ma pauvre mémoire oubliant la valeur Prive ainsi l'estomac du bienveillant lecteur. Le brave Parisien n'a plus pour sa pâture Que le triste produit d'une fabrique impure ; Mais c'est la foi qui sauve, et sans trop s'affliger Il mange simplement tout ce qu'il croit manger. '2; Il est d'ailleurs si fier de son superbe titre D'habitant de Paris, qu'il se pose en arbitre, Et juge ses vins bleus grandement supérieurs A ceux que nous buvons dans nos crûs les meilleurs. Paris, en toute chose, a bien plus d'excellence Que les obscurs cantons du reste de la France. Lui seul a de l'esprit, et si, par grand hasard, Le savant de province en veut prendre sa part, On pille sans remord sa chère découverte. Autour de lui se crée une place déserte, Et le bon Parisien, riant de son malheur, Dans un long feuilleton l'ait mousser le voleur. (1) Je me trouvais un jour dans l'officine d'un industriel, quand je vis une masse d'affiches, arrivées de Paris, pour préconiser les vertus de l'alathaïm du sérail. Je demandai au maître de céans, quelle élait la na- ture de ce fameux aliment, et, dans un excès de franchise, il me répondit : « c'est un mauvais chocolat, que l'on vend plus cher que l« bon. n (2) Je crois qu'Alphonse Karr a dit cela avant moi 19