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276                     EXPOSITION DE LA SOCIÉTÉ
mangeoire; ce sont les deux meilleures études d'animaux que nous ayons;
l'attelage de bœufs est dessiné avec beaucoup de savoir ; il est fâcheux que
le paysage au milieu duquel il est placé manque de perspective et que les
terrains soient d'un ton peu harmonieux.
    La mutinerie, la colère du cheval blanc qui se cabre, son impatience
du lien qui le relient captif, sont exprimées avec une précision qui dénoie
une observation assidue des mœurs chevalines.
    M. Duclaux déploie toujours une parfaite entente des allures et des
formes du cheval; ses tableaux sont d'une couleur gaie, ils ont de l'ani-
mation et de la variété ; quelques petites négligences se remarquent pour-
tant dans ses œuvres de celte année ; on y voit certaines chèvres trop
peu agiles; on peut y découvrir au second, plan il est vrai, un taureau,
dont la face démesurée et insensible semble être l'effigie de granit d'un
dieu égyptien.
    M. Guy nous donne un Marché aux porcs sur lu, place d'un village; c'est
une scène pleine de mouvement: paysans, vendeurs, acheteurs, garde
 champêtre , sont modelés avec esprit, leur action est exacte et vive , et
tournant un peu parfois à la caricature ; ce tableau est d'un faire beau-
 coup plus soutenu que ce que nous connaissions précédemment de
M. Guy; mais pourquoi choisit-il si souvent pour exercer son talent de
 peintre et de dessinateur, une espèce d'animaux qui ne présente que des
 formes confuses et indécises, dont la vue ne peut intéresser, car l'homme
 ne trouve dans sa physionomie aucune de ces grandes qualités vitales,
 force, courage, attachement, élégance, dont il aperçoit le reflet dans le
taureau, le cheval, le chien, et autres animaux mieux dotés par la nature.
    M. Fromentin, M. Paris, M. Simon de Marseille continuent de justifier,
 par les excellentes productions qu'ils exposent, l'estime attachée à leur nom.
     Nous voici arrivés à la partie de l'exposition spécialement lyonnaise,
 à la peinture des fleurs et des fruits. Si l'esprit ne devait éprouver de
 l'intérêt que pour les choses nouvelles et hardiment originales , il ne
 trouverait guère ici de sujets d'émotion. Nous sommes dans le royaume
 de la beauté calme, dans le sancluaire des lignes pures , de la jeunesse
 et de la fraîcheur renaissant toujours. Ce monde n'a d'autres passions, d'au-
 tres tristesses, d'autres amours que ceux que nous lui prêtons; il faut à l'ar-
 tiste un goût pour la contemplation peu ordinaire , un sentiment exquis de
 la beauté dans son acception la plus abstraite, pour consacrer sa vie à l'é-
 tude des fleurs. A. Lyon, l'intérêt de nos manufactures, vouées aux exigen-
 ces de la coquetterie féminine, est un second mobile qui aide aux progrès
  de cette branche de l'arl et soutient la vocation des artistes. Nulle part on
 n'en trouverait de supérieurs à ceux que nous possédons dans ce genre.
     Fêtons d'abord le retour de M. Saint-Jean, dont les œuvres nous faisaient
  défaut depuis quelques années et qui ne nous apporte pas moins de six
 tableaux, six merveilles de coloris et de lumière. Ses fruits, admirablement
 choisis, dans leurs tonnes et leurs types , nous transportent au milieu des
  vergers de l'Eden, ce n'est pas nous qui lui reprocherons la magnificence dont
 il aime à les revêtir; mais nous demanderions à M. Saint-Jean de moins
 abandonner la peinture des fleurs, nous lui demanderions surtout de re-
  venir à ces grandes compositions où il savait si bien associer les bas reliefs
 antiques, les aiguières de Florence, les bois sculptés de la renaissance, aux
  trésors de l'été et de l'automne. Montrer les chefs-d'œuvre de l'homme
  auprès des chefs-d'œuvre de la nature, les conceptions de l'élève auprès
  des enseignements du maître, indiquer les rapports d'élégance, d'harmonie
  et de sentiment qui existent entre eux, ce sont là des tentatives qui réussis-
  sent à M. St-Jean et qui sont dignes d'un talent magistral, comme est le sien,