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152                    PEINTURES MURALES
   Par un sage tempérament entre la forme et l'idée, M. Flandriu
a mérité une autre destinée ; il a su faire accepter son talent des
connaisseurs et conquérir dans les arts une place incontestée.
Tout ce qu'il y a d'instruit à Paris tient compte de ses œuvres,
et ceux qui seraient moins disposés à les étudier comme expres-
sion d'une doctrine, les apprécient comme modèles de dessin
et de style ; la forme en fait accepter le fond. Il est regrettable
que les Lyonnais ne puissent le juger que d'après les peintures
murales faites à Ainay ; elles sont sans doute à la hauteur de
ses autres œuvres. Néanmoins, elles ne sauraient aller de pair
en importance avec les travaux considérables exécutés par lui, à
Saint-Paul de Nismes, à Saint-Germain-des-Prés et à Saint-Vin-
cent de Paul à Paris. Ce sont là les vrais titres de M. Flandrin ;
ces beaux ouvrages honorent notre siècle ; ils prouvent une géné-
reuse réaction contre cette tendance générale qui nous entraine
vers la matière, et dont trop d'artistes de nos jours se font les
courtisans et les propagateurs ; ils vivront, et la postérité les
montrera avec cet orgueil légitime qu'inspirent aux Italiens les
fresques de leurs grands maîtres.
   Avant de passer à l'analyse de l'ouvrage, qu'on nous permette
encore un mot sur son caractère général.
   M. Flandrin s'est proposé d'allier la forme grecque avec l'idée
chrétienne, et ces deux choses s'excluent beaucoup moins qu'on
ne le pense au premier abord. L'idée chrétienne, c'est la plus
haute de toutes les idées. La forme grecque, est la plus belle
de toutes les formes. La plus haute idée ne semble-t-elle pas
appeler, pour être exprimée, fa plus belle forme ? Prétendrez^
vous que dans l'art religieux une forme belle soit incompatible
avec l'idée ; que pour exprimer l'ascétisme chrétien, il faille avoir
recours à des formes raides, anguleuses, amaigries, et qui laissent
entrevoir des squelettes au lieu de corps sous les draperies ?
Mais ce serait dire que l'idée religieuse est inconciliable avec le
beau. Or le beau n'est-il pas l'objet véritable de l'art? Pris dans
sa haute acception , l'art doit-il représenter la réalité incom-
plète et même triviale, telle qu'elle se rencontre dans la rue, telle
que M. Courbet se charge de nous la mettre sous les yeux ? Ne