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                  MADEMOISELLE DE MAGLAND.                        523
lent, l'exercice d'un art, ne peut s'acheter qu'aux dépens de la
vertu. Elle s'effraie de voir mon avenir confié à une femme si peu
semblable à celles de son temps et de sa province. Je lui ai si souvent
dit quel cœur parfait, quel admirable caractère Marie cachait sous
ces dehors beaux et gracieux, c'est avec tant de conviction que je
lui ai peint le bonheur qui m'attendait auprès d'une femme dont
l'ame affectueuse et chaste, l'esprit cultivé, les goûts élégants don-
neraient à mon intérieur des plaisirs toujours nouveaux, que je l'ai
enfin amenée à consentira mon mariage ; mais Marie n'a pu trouver
grâce devant elle ; si elle la connaissait, nul doute qu'elle ne la ju-
geât mieux, mais Marie a trop de franchise pour cacher ce qui peut
lui déplaire dans ses goûts ou dans son caractère. Ma mère aurait
préféré que mon choix se fût porté sur une cousine de Marie, pu-
pille et nièce de son père, qui habite avec eux depuis la mort de
sa mère, propre sœur de M me de Magland, qui avait épousé, malgré
ses parents, un homme très riche, très beau, dit-on, mais d'une
extraction commune. Ce défaut de naissance m'a heureusement pré-
servé des instances de ma mère à ce sujet, car M110 Alix est pour
moi, malgré son extrême beauté, une femme insupportable; mais
laissons M"e Alix. Je veux te présenter au Genêt ce soir, tu la ju-
geras. M. de Magland te plaira ; c'est un homme qui n'a pris à l'âge
mûr que quelques rides et quelques cheveux blancs. Il est passionné
pour les arts qu'il cultive plus en artiste qu'en amateur. Son oncle,
le comte de Malvignane, dernier chevalier de Malte de la langue
de Provence, est le type du caractère français dans son antique!
loyauté, particulier à celte vieille noblesse dont nous ne saurons
bientôt plus rien que par tradition; bon, généreux, grand dans
toutes ses actions. On dirait que c'est pour lui que fût créé le vieil
adage : Noblesse oblige. Marie, sa petite nièce, est l'objet de son
idolâtrie; quant à Alix, il ne lui pardonnera jamais d'être la fille.
d'un marchand, et de savoir l'ariihmélique aussi bien que son père.
Tu connais maintenant toute la famille qui sera bientôt la mienne.
M. de Magland a désiré que notre mariage n'eût lieu qu'au mois do
mai. C'est six longs mois à attendre encore, mais j'ai obtenu de ma
mère de resler à Hauterive, M. de Magland voulant passer l'hiver
au Genêt; le temps s'écoulera ainsi plus rapidement que je n'aurai