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E l DANS LE TEMPS 473 Un mal à mesure qu'il sent son existence se diminuer. Tel est l'énoncé du fait qui a lieu dans la double existence spirituelle et matérielle de l'homme. Le bien et le mal physique, le bien et le mal moral s'expliquent entièrement par cette conception. « Le mal, dit le système précédent, n'est que la négation de l'infini dans la créature. » Non pas! le mal n'est que ce qui s'oppose à la réalisation de l'infini dans la créature. Ou bien, le mal serait la création même, et c'est Dieu qui en serait l'auteur. Le mal n'est pas de Dieu, mais de ce que la créature n'entre pas dans les desseins de Dieu. L'existence de l'âme n'est donc pas un mal en ce qu'elle n'est pas actuellement infinie ; mais l'ame peut se mettre dans le mal en ce qu'elle peut s'empêcher de s'élever à l'existence infinie. La créature n'est donc pas un mal en ce qu'elle est, car ce qu'elle est est déjà un incomparable bien, puisqu'il est la condition de tout autre; le mal est en ce qu'elle s'oppose à ce qu'elle doit être, et échappe au bien pour lequel elle est créée. Le bien, pour toute créature, est donc la possession de l'être que comporte son existence ; le mal est la diminution de cet être. Notre être, qui pour nous est un bien quoiqu'il ne soit pas infini, pour Dieu serait un mal, puisque ce ne serait pas tout l'être que comporte la nature de Dieu. De même, quand nous ne développons pas notre être, que nous ne l'élevons pas à la vie absolue, il y a pour nous un mal, parce que nous n'acquérons pas tout l'être que comporte notre na- ture. Aussi notre nature réclame-t-elle ses droits par la douleur. La douleur n'est que le sentiment ou l'avertissement de la di- minution de l'être. Tout être souffre à mesure que la maladie lui enlève la vie qui lui appartenait; comme tout être jouit à mesure que la santé lui rend la vie qui lui échappait. Et la souffrance est un mal parce qu'elle est l'avertissement du