page suivante »
EXCURSION DANS LE MIDI. 393 bole de la gloire qui s'évanouit comme elle se gonfle, au plus léger souffle. Deux autres soldats conduisaient une chèvre le long des remparts pour lui faire brouter l'herbe qui croît là depuis trente ans, à l'ombre de la paix. Ils étaient en tout dix fusilliers et un caporal, composant l'effectif de la garnison du fort, garnison parfaitement pastorale et qui au- rait très bien servi de modèle à un peintre pour la mise en scène d'un tableau représentant les fatigues de la guerre au temps de l'âge d'or. Notre-Dame-de-la-Garde fut, dès le VI e siècle, un lieu d'observation d'où l'on donnait avis à la ville des vaisseaux et des bâtiments marchands qui entraient dans la rade. Au rapport de l'historien Ruffi, une tour d'observation placée en cet endroit correspondait avec une multitude d'autres tours placées de distance en distance le long de la côte jusqu'à Anlibes. Le terme assigné à celte ligne d'observation sera facile à expliquer pour ceux qui savent qu'Antibes (Antipolis) était une colonie marseillaise. Dans cette condition, elle de- vait recevoir les ordres de Marseille, la métropole, et avoir des communications à lui faire. C'était une ligne télégraphi- que qui n'avait pas attendu l'invention de M. Chappe ( i ) . Les avertissements que celte montagne transmettait à la ville lui firent donner le nom de Montagne de la Garde. Un ancien Seigneur de Marseille (ville épiscapale), l'abbé de Saint-Victor, qui fut pape sous le nom d'Urbain V (1362), fit bâtir sur celle montagne une église dont la chapelle fut dédiée à la Vierge, et devint bientôtpourles marins un lieude pèlerinage. La chapelle (1) Végèce, qui vivait au IVe siècle, parle de celte sorte de télégraphes comme étant si bien connus de son temps, qu'il juge inutile de les dé- crire. Voici textuellement ce que dit cet auteur : « Aliquanti in castellorutn aut urbium turribus appendunt trabes, quibus aliquando erectis, aliquaudo deposites, iadicanl quœ giruutur. » livre III, chap. v. Quelques-uns sus- pendent sur les tours des villes ou des cbâteaux, de grosses pièces du bois qui, en s'élevanl ou en s'abaissant, indiquent ce qui se passe.