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                        ET DANS LE TEMPS.                            507

de la création, mais en ce qu'il est le contraire de l'amour,
c'est-à-dire de la loi sur laquelle repose toute existence, créée
ou incréée. Il n'est le pire des maux que parce qu'il les ren-
ferme tous, qu'il est l'état opposé de l'être.
   Voici donc ce que fil l'homme dès son entrée dans le
 temps. Comme il était selon les conditions d'un être créé de
ne pouvoir jouir de la félicité qu'en se donnant pour vie ce
qui fait la félicité de Dieu, ou l'amour, Dieu ouvrit la création,
mit l'homme en ce monde et lui donna conséquemmenl pour
unique loi de l'aimer de tout son cœur, de toute son ame et
de toute sa force (1). Et l'homme, par un atroce égoïsme, a
désiré posséder l'être, sans passer par l'amour. 11 a voulu
jouir de Dieu sans l'obtenir, et entrer en quelque sorte en
possession de lui-môme malgré lui. En un mot, l'acte de
l'orgueil, par lequel est tombé l'homme, n'a été ni plus ni
moins qu'une tentative de viol sur la Divinité.
   O homme! dis-moi où tu as puisé une aussi précoce p u -
berté? Avais-tu déjà tellement accru l'amour dans ton cœur
que tu ne pusses plus en porter le poids, et que tu sentisses le
besoin de le donner à Dieu? Ah ! plutôt, je vois que tu n'agis
ainsi que parce que ton cœur n'a point eu d'amour, car tu
cèdes à l'ignominieuse faiblesse d'un être qui ne peut aimer !
   Qu'est-ce donc que l'orgueil? le refus de passer par les
lois que l'auteur des êtres avait disposé pour que ceux-ci
pussent arriver naturellement à lui, et jouir de sa félicité. Et
qu'est-ce donc que ce refus? une absence radicale d'amour.

  Par suite des motifs et des sublimes lois de la création,
Dieu avait déposé l'homme et la femme dans le jardin de
leurs délices, et leur avait dit de cueillir tous les fruits de

  (i) Deuteron., caput VI, v. 5. Dominus, Deus noster, Dominus unus est.
Diliges Dominum ex loto corde tuo, ex tota anima tua, ex tota fortitudine
tua.