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490 DU BiEN DANS L'ABSOLU Le premier acte de perturbation qui soit entré dans le sein de l'existence, la première parole de désordre qui ait retenti dans le monde, sont donc là : Vous SEREZ COMME DES DIEUX ! . . . Nous comprendrons bientôt jusqu'à quel point les lois de l'amour sont bouleversées par ce fait ; et comment ces lois, sur lesquelles repose l'infini, se trouvent interverties au point de frapper môme d'impossibilité la continuation de la créa- tion. Mais il faut auparavant que nous comprenions ce qu'il y a au fond de l'orgueil, et comment il naît des ruines de l'amour. Toutefois, d'après celte seule observation du phénomène de l'orgueil, c'est-à -dire du mouvement intempestif d'assôité dans l'être créé, nous pouvons aisément comprendre les con- séquences qui doivent résulter. L'orgueil, pour la plante, consisterait à retirer sa racine du sein de la terre, persuadée qu'elle puise en elle-même sa propre sève. L'orgueil, pour l'animal, consisterait à empêcher son estomac de prendre des aliments, persuadé qu'il lient en lui-même l'intarissable chyme qui doit en- tretenir son sang. L'orgueil, pour l'ame, consiste pareille- ment à retirer sa racine du sein de l'absolu, en suspendant, par le défaut de son consentement et de sa pratique, des rapports spirituels qui sont les canaux par lesquels la sève divine pénètre en elle. Car l'homme qu'esl-il autre chose que le végétal spirituel qui prend racine et croît dans le sein de Dieu! Aussi l'orgueil coupe-t-il l'homme à sa ra- cine. L'homme suffisant ne considère plus l'impersonnel senti- ment de l'amour, celui du juste, du vrai et du beau comme produits en lui par la pure substance intelligible, que Dieu