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SONNET A M. AIMÉ VINGTRINIER Pourquoi dans un sonnet étrangler sa pensée ? Si pour quelque chef-d'œuvre un beau cadre me plait, Je n'éteindrais jamais sur l'étroit chevalet, Comme un vil criminel, ma Muse embarrassée. Ce qu'il faut, une fois la rime égalisée Comme des ailes d'aigle — ou bien de roitelet, Ce n'est pas qu'elle courbe, obséquieux valet, Devant un fouet brutal, sa grâce cadencée. Son destin est le vol libre, capricieux ; Qu'elle effleure les eaux, qu'elle aille au fond des cieux, Qu'elle brise tout frein! l'espace est son domaine. L'univers est à toi ! songe que c'est meilleur Qu'un sonnet, vrai carcan, Poésie, ô ma reine, Et ne va pas ramper aux pieds d'un rimailleur. Eugène ROULLF.AUX. Bourg, 5 avril 1875. 24