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420                        VICTOR DE LAPRADE

siens. La mère, égrenant les perles de son chapelet, invo-
quait le secours de la Vierge. Le front haut, la jeune fille
ressemblait a ces druidesses farouches qui soufflaient le feu
des combats dans le cœur des guerriers gaulois, et souvent
ses regards cherchaient sous la main d'un blessé une épée
devenue inutile qu'elle put brandir à son tour. Parvenue
dans la forêt, elle prend place au combat, près de Pierre.
Les quartiers de granit, le plomb, tout, pour ses vaillants
soldats, devient une arme pour les assaillants qui, décimés,
se retirent. La bataille est gagnée.
   Hélas ! pendant que Pierre se penche hors du fourré qui
le protège pour suivre des yeux la retraite de l'ennemi, une
balle perdue l'atteint ; le sang jaillit de sa poitrine; il chan-
celle, il s'affaisse sur la mousse.
      « Pcrnelte entre ses doigts glacés d'un froid nerveux
      Tenait sur ses genoux la tête aux longs cheveux ;
      Accroupie et le dos appuyé contre un arbre,
      Pâle et sans voix, pareille à ces vierges de marbre
      Que l'on voit défaillir au pied du crucifix,
      Madeleine appelait : « 0 mon fils ! 6 mon fils ! »


   Il ne l'entendra bientôt plus. Le docleur a sondé la plaie
et levé sur Pernette un regard significatif.
      « Elle reçut le coup, mais sans le laisser voir ;
      Elle reprit sa force en quittant tout espoir,
      Et de ses bras ardents, sans cri, sans plainte amère,
      Embrassa Madeleine et lui dit : « O ma mère ! »


   Celle-ci a envoyé vers le pasteur. Il accourt; le voilà
devant le moribond. A 'sa vue, tous les cœurs se brisent et
les sanglots éclatent. Mais écartant du geste ces amis éplo-
rés, le prêtre s'agenouille près de son pauvre enfant, imprime
sur son front un baiser humide de larmes, approche l'oreille