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LES HABITATIONS 175
« Au débouché du pont de la Guillotièie, dit un de nos
anciens chroniqueurs, s'élève un petit bourg auquel le peuple
a donné le non de chanin, parce que, située auprès de la
place de Bellecour, qui alors était souvent inondée par les
grosses eaux du Rhône, son voisinage le rendait insalubre. »
Pour compléter cette phrase, nous ajouterons que cet
emplacement de Bellecour était, au Moyen-Age, un marais
coupé de lônes et couvert de roseaux ou cannes, une can-
nivière ou chanivière en un mot. Or donc, il n'est point
étonnant que le bourg en question ait pris, dès le principe,
le surnom de canin ou chanin, latine caninus, cause invo-
lontaire sans doute de la fausse interprétation qui l'a trans-
formé en burgus caninus ou bourg de chien.
De plus, il existe à Mornant, à Sain-Bel, a Pontcharra,
'a Montaney, a Saint-Didier-sur-Ghalaronne, Ã Montverdun
en Forez le Lyonnais, en Bresse et dans les Dombes,
des Bourg-Chanin, tous situés près de ruisseaux, d'étangs
ou de terrains marécageux produisant des roseaux, des
cannes. La partie supérieure de l'Albarine, près des sources
de cette rivière qui entretenait là et entretient encore, de
vastes marais, est latinisée vallis camna; ainsi que le
témoigne la mention qui accompagne le nom du village de
Corcelles situé dans cette haute vallée : vicarius de Corcellis
in valle canina.
En Provence, on donne le nom de cannelles au premier
tressé en cannes; une canevière ou chenevière est un lieu
rempli de cannes ou roseau. A la Pape, on voit la lône dite des
Cannelles; la Mouche, à Ivours, jaillit d'un endroit appelé les
Cannelles,dénomination due aux mêmes productions maréca-
geuses qui encombrent la source de cette petite rivière, dont
les eaux vont se perdre dans le Rhône après avoir, dans leurs
cours d'une lieue à peine d'étendue, communiqué le mouve-
ment à nombre de moulins et autres usines de diverses natures.
Le baron RAVERAT.