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410                 CINQ JOURS A DRESDE.

    Continuez à croire que vous marchez à la tête de la civi-
 lisation.
    On vous le dit assez pour que vous n'ayez aucun doute
 à cet égard.
    Et un beau jour, vous vous réveillerez en retard d'un
 siècle sur tous les peuples qui vous entourent.
    Et ce sera"bien fait, car vous ne vous serez donné au-
 cune peine pour sortir de la nullité morale où vous vous
plongez tout doucement.
   Sachez regarder autour de vous et reconnaître ce que les
 autres ont de meilleur. Le premier pas vers la perfection
 est de constater que l'on n'est pas parfait.
    Il faut pourtant que je m'arrête dans mon dithyrambe.
 Je n'aurais jamais cru que ces petits gymnasiarques m'au-
 raient mené si'loin.
    Dans l'après-midi un orage formidable fondit sur la ville.
L'ouragan fut si violent que plusieurs énormes tilleuls,
deux fois centenaires, furent déracinés tout près duSaenger-
halle. Quant au solide palais de sapin, malgré son appa-
rence fine et délicate, il résista parfaitement; pas une
planche ne fut enlevée, pas une tourelle ne broncha.
    J'avais été invité, pour le soir, à un bal que les Pauli-
ners devaient donner dans une des superbes salles de
concert que possède Dresde.
    J'arrivai de bonne heure, pensant être des premiers, et
quand j'entrai la salle était comble. Je m'attendais à voir
danser; ah bien oui ! Chaque famille était groupée autour
d'une table, buvant de la bière et mangeant des saucisses.
Sur une sorte de théâtre, les étudiants, dirigés par Langer,
chantaient des chœurs avec la plus grande perfection;
c'était charmant, mais ce n'était pas un bal. Les toilettes
étaient fort simples, les habits noirs se comptaient et pa-
raissaient très-malheureux. La corne d'honneur des Pauli-
ners, pleine d'une bière succulente, circulait de mains en
mains, et chaque jeune fille y trempait ses lèvres.
  C'est là qu'on me présenta à la jeune personne qui, au