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24 HIPPOLYTE D'ESTE. en grossissant, si bien qu'on les aurait pris pour des balles d'ar- balète; son cheval s'épouvantant, il tourna bride, et courut ventre à terre jusqu'à ce qu'il eût retrouvé ses compagnons. Ceux-ci, non moins effrayés que lui, s'étaient réfugiés sous des pins ; bientôt la grêle arriva à la dimension d'un citron ; Cellini se mit alors à entonner le Miserere, et pendant qu'il s'adres- sait ainsi dévotement à Dieu , un énorme grêlon fracassa une forte branche du pin sous lequel il se croyait en sûreté ; un autre frappa son cheval à la tête et faillit le renverser ; il fut lui-même atteint par un troisième grêlon ; mais heureusement parricochet, car autrement il serait mort sur le coup. Le pauvre vieux Léo- uardo, qui, comme Cellini, était agenouillé, fut de son côté, ren- versé les mains contre terre. Aussitôt que Cellini vit que les pins ne pouvaient plus le protéger, et qu'il ne suflisait pas de chanter le Miserere, il étendit ses habits sur sa tète, et dit à Léonardo, qui criait « Jésus, Jésus, au secours! » que Jésus lui aiderait s'il s'aidait lui-même. Le salut de ce poltron coûta plus à Cellini que le sien propre. Cet ouragan se dissipa enfin ; les voyageurs, tout moulus, remontèrent à cheval, en se montrant leurs contu- sions et leurs meurtrissures. A un mille de là , dis scènes de dé- solation que l'on ne saurait décrire, vinrent s'offrir à leurs re- gards: des arbres ébranchés et brisés, des bestiaux assommés et plusieurs bergers écrasés et sans vie ; ils virent quantité de grê- lons que l'on n'aurait pas tenu dans les deux mains ; ils s'esti- mèrent fort heureux d'être sortis de ce mauvais pas à si bon marché ; ils reconnurent alors l'efficacité de leurs prières; ils rendirent à Dieu de ferventes actions de grâces, et, le lendemain, ils arrivèrent à Lyon ; ils s'y reposèrent huit jours, et franchirent les monts sans accident. Cellini nous apprend, dans son Traité d'orfèvrerie, qu'il sé- journa en France quatre années entières. Il mourut à Florence, le 15 février 1570, sans avoir revu son illustre protecteur. Entre autres ouvrages de sa main, le Musée de Taris possède un buste colossal en bronze représentant Jules César; — le piédestal en bronze doré pour la statue de Jupiter, avec deux bas-reliefs re- présentant Léda et son cygne, et l'enlèvement de Ganymède;— un petit vase doré destiné à Mme d'Etampes.