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DE L'HISTOIRE DE FRANCE. 507 romains s'enferment et s'isolent dans les châteaux qu'ils forti- fient, que les évoques sauvent les villes et les populations en se jetant aux pieds des rois barbares, ces barbares eux-mêmes proclament le triomphe d'une civilisation plus grande que leur victoire, et s'inclinent, suivant la belle expression de Fénelon, devant le Dieu qu'ils n'ont pas cherché. Saint Augustin, Salvien, saluaient, peut-être avec un vague pressentiment plutôt qu'avec une foi réelle, la venue de ces milices étrangères chargées d'ac- complir un dessein providentiel. Mais le baptême de Clovis con- firme leurs prévisions ; le récit traditionnel de cette cérémonie, tel que Grégoire de Tours nous l'a conservé, atteste avec quelle vive sollicitude la société et ses représentants, concentrant alors toutes leurs espérances sur ce nouveau pouvoir, entou- raient le berceau de la monarchie du cortège des traditions ro- maines ressuscitées tout exprès, et la consacraient par la voix de l'Eglise. Deux fois, sous les deux premières races de nos rois, la re- constitution du gouvernement fut tentée, et deux fois, après un succès passager, elle tomba frappée d'impuissance. C'est à l'E- glise, ce n'est pas aux rois Mérovingiens et Carlovingtens qu'il faut d'abord faire honneur de cette tentative. Il suffit d'ouvrir Grégoire de Tours pour comprendre que la barbarie ne pouvait par elle-même rien produire ; l'hypothèse d'une civilisation pri- mitive chez les Germains, hypothèse appuyée longtemps sur une fausse interprétation de Tacite, est aussi chimérique que celle d'un état semblable chez les Gaulois. Les Barbares, n'eurent pour eux que la force militaire, qui deux fois, au VIe siècle avec Clovis et ses fils, au Vil Je avec Charles-Martel, Pépin, Charle- magne, conquit le territoire et créa l'unité de la France mo- derne que se disputaient des nations diverses. Mais cette force fut toujours un instrument dans les mains de l'Eglise. C'est l'Eglise qui couronne Clovis et ses successeurs ; c'est elle qui couvre le territoire, alors peu peuplé, de la France septentrio- nale, de ces nombreux monastères qu'on a comparé à de vastes colonies agricoles, et qui changeaient en effet, par leur présence au milieu des bois et des montagnes, la face entière