page suivante »
NOTICE SUR M. DUCLAUX. 143 lions- d'aucune sorte, sûr du moins de notre conscience, et per- suadé que la postérité, dans sa justice, ratifiera ce que nous al- lons dire d'un artiste éminent. « Un peintre qui a parfaitement imité la nature, dit d'Argen- ville dans la préface de son grand ouvrage, n'eût-il fait qu'une . vache, est aussi parfait dans son genre que Raphaël l'est dans le sien... Zeuxis trompait des oiseaux par l'imitation d'une cor- beille de fruits et Parrhasius trompait Zeuxis lui-même par la peinture d'un rideau. » Malgré leur exagération, ces lignes d'un homme compétent répondent à ceux qui voudraient blâmer M. Du- claux de s'être enfermé dans une spécialité peu relevée. Lafontaine aussi a fait des poésies d'un ordre qu'on peut juger inférieur, et cependant nous croyons que son nom vivra aussi brillant dans l'histoire que ceux de Corneille et de Molière, et plus longtemps, sans doute, que ceux des Brébeuf et des Chapelain dont les poèmes épiques n'ont pas donné l'immortalité à leurs auteurs. Quant aux écoles, quant à cette guerre éternelle entre l'idéalisme et le positi- visme, qu'on nous permette, pour aujourd'hui, de tenir notre dra- peau plié; nous remplissons une mission de paix et non de guerre. M. Duclaux a borné son ambition à reproduire les humbles ani- maux de la ferme et de la bergerie. Bœufs, chèvres, brebis, ânes, chevaux sont de son ressort, mais il les rend, il les imite avec une rare perfection. La scène qui les entoure, le paysage dans lequel ils vivent ne rappellent pas les grandes convulsions de la nature. Les paysages tourmentés de quelques maîtres ont toujours paru à M. Duclaux une exception. Dans son désir d'être vrai, il a étudié la nature autour de lui, et ne voyant pas dans les vallons de la Saône et dans les prairies du Garon, ces cascades gigantes- ques, ces rochers fendus, ces ponts jetés sur les abîmes comme on en trouve dans les Alpes et les Pyrénées, et comme Pillement les aimait, il s'est tout simplement attaché à rendre, avec une bonhomie digne de Lafontaine, ces bouts de prairie, ces coins de bois, ces carrefours de chemins où chaque jour tout le monde peut voir assise une bergère filant, deux ou trois vaches dor- mant, tandis que le chien regarde et qu'une chèvre capricieuse se dresse pour atteindre l'extrémité d'un rameau. Cette simpli-