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204 CONSTANCE DAYÉER. qu'elle m'a payé mon voyage et tout mon gage sans retenue. Au bout de huit jours, je suis rentrée en pleurant et disant que mon oncle était mort, que ça me contrariait bien, parce que je l'aimais bien, mais qu'il s'en doutait parce qu'il m'avait laissé de quoi me consoler et que je rentrais au pays pour voir si quel- que brave garçon, pour ma bonne mine ou mon bien, ne venait pas me demander en mariage. J'ai eu bien de la peine à me garder de rire, car il me semblait que je me faisais un conte de fées. Madame a pris tout ça pour argent comptant, et elle m'a bien priée de revenir les voir ; la-dessus je les ai tous em- brassés, même monsieur, qui est un bien bel homme. C'est dom- mage qu'ils aient eu cette idée de s'en aller à la campagne, où l'on n'aurait pas vu un chat. Sans ça j'y serais encore restée. J'avais été si vite que je me trouvais sans place. Enfin, j'en ai une à présent, en attendant qu'il m'arrive un héritage et même un oncle ; je t'en parlerai plus tsrd ; je ne la connais pas en- core à fond. Et toi, as-tu une famille ? Peutrêtre que tu fais la dame à l'heure qu'il est et que tu ne voudras plus te souvenir de ta pauvre Louise, qui ne met de beaux tabliers que quand elle ne porte pas les siens. Tu sais bien que la sœur Débonnaire aussi bien que la mère Distributrice ont toujours d't qu'avec ta figure lu étais certainement la fi'lc d'un bel officier, séducteur d'une grande dame, et que plus tard, avec ton billet,de tour, tu le retrouverais général. Je pense justement quêtes dix-huit ans étant passés, on a dû te déplier ce fameux papier. Est- ce que c'était le bon billet? As-tu gagné le gros lot? Tu me feras bien plaisir de me le dire. Je pensé toujours à toi et j'es-- père bien que, si tu es encore l'enfant de la Charité, tu en fais de même. Je t'embrasse bien. Adieu, Ton amie, LOUISE MACARIEL. LETTRE IV. De Constance Daymer à Louise Macariel. Abbans, 15 mars 1865. Ma chère ami-.*, Je ne suis pas encore changée en princesse, ni en grande