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LA FABRIQUE DE LYON AU XVIIIe SIÈCLE. 119 de la ville de Lyon, les étoffes de soie unies occupaient la presque totalité des ouvriers. Les besoins du gouvernement et la masse énorme des dettes de l'Etat (1) forcèrent de donner aux impôts la plus grande extension, et les dettes particulières de notre ville nécessitè- rent des droits d'octroi considérables. Les loyers étaient devenus chers, ainsi que les denrées de première nécessité, et par suite de cela le prix des façons se maintenait beaucoup plus haut que dans la plupart des autres manufactures de l'Europe, de ma- nière à créer une différence de 10 à 12 %>• On vit, en 1787, une masse d'ouvriers réduits à la misère et à l'inaction. Deux mille ateliers furent détruits et quatre mille ouvriers au moins abandonnèrent leur ville natale. On possédait autrefois dans les étoffes brochées une branche d'industrie qu'aucune nation rivalç ne pouvait enlever aux Lyonnais ; mais la mode fut la cause que les étoffes unies l'emportèrent sur les façonnées et se vendirent" seules. A l'avènement de Frédéric-le-Grand, il n'existait aucune manufacture de soie en Prusse, et à sa mort on comptait 2,800 métiers à Berlin. On désirait alors que le roi et la reine de France proscrivissent par leur exemple le port des étoffes anglaises, dont l'immense consommation ruinait les manufactures françaises et enrichissait les Anglais. On demandait aussi qu'une loi assurât à tous les fabricants la propriété perpétuelle de leurs dessins, et qu'elle ne fût pas limitée à quelques années. L'auteur de ce mémoire le termine par ces mots : « Si notre industrie est favorisée, comme « nous l'espérons, si nos fabriques se vivifient, -alors nous re- « cueillerons les fruits les plus doux de notre travail. » Hélas! la Terreur de 93 mit bientôt à bas toutes ces espérances, et, parmi les 1,684 malheureux, guillotinés ou mitraillés à Lyon, par suite des jugements de la Commission révolutionnaire, on compte un grand nombre de fabricants et d'ouvriers. (Jugera, de la Comraiss. révolut. de Lyon.) (1) Cette masse énorme était certainement bien peu de chose, en côm pà raison de notre dette actuelle ; mais nous marchons en tout de progrès en progrès.