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ÉLOGE DE LOUIS-GABRIEL SUCHET. 55 une nécessité providentielle, à laquelle le pays fut redevable de son salut. Erreur fatale 1 mensonge politique dont l'his- toire fera justice ! La France triompha malgré la Terreur, malgré la Convention, qui prenait à tâche de multiplier les obstacles et qui soulevait le monde entier par ses attentats. Si nos pères eurent à subir au dedans l'oppression la plus sauvage et la plus tyrannique dont les annales des peuples fassent mention , en même temps qu'ils déployaient tant de courage et d'énergie envers l'étranger, le secret de ce con- traste ressort d'un des traits historiques de notre caractère national : à toutes les époques de péril, la France sacrifia la liberté à l'indépendance , et les invasions y favorisèrent tou- jours les dictatures. Robespierre, qui régnait encore au com- mencement de 1794, tomba le jour où les citoyens cessèrent de craindre pour l'intégrité du territoire. Il n'y a pas plus de cinq ans que nous étions courbés sous une dictature républicaine ; mais la France , revenue de sa stupeur, s'est hâtée d'en secouer le joug. C'est que la France ne se laisse conduire aux révolutions qu'à son insu; mais dès qu'elle voit face à face une révolution nouvelle , alors elle la prend en haine et s'en épouvante. Elle n'a plus que des im- précations contre tous ceux que, la veille, elle écoutait avec une confiance hébétée. A l'aurore de l'Empire, la guerre d'Allemagne vint offrir à Suchet un nouveau champ à ses exploits et à sa gloire. Dès l'ouverture de la campagne de 1805 , sa division devint la l r e du 5e corps de la grande armée , commandée par le ma- réchal Lannes ; elle se distingua à Ulm et à Hollabrum. A Austerlilz, elle enfonça la droite de l'armée russe et la sépara du centre. C'est là que Suchet se signala par une manœuvre aussi hardie que savante : tout en dirigeant sur les Russes ces feux tranquilles et sûrs que nos troupes, aussi instruites qu'aguerries, exécutaient avec une extrême préci-