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90                          NÉCROLOGIE.
à la foule. Comme les artistes du moyen-âge, il voulut boire à toutes
les sources de l'art, il voulait tout comprendre et tout connaître.
Doué d'une riche organisation, il eût, avec une meilleure santé,
réalisé de grandes choses, lant il avait le travail facile et la mémoire
meublée.
    Dans les courts répils que lui laissa la maladie, il entreprit
quelques voyages, parcourut le Midi de la France, vit la Bel-
gique, l'Angleterre el l'Ecosse, et en rapporta de nombreux mo-
tifs et de belles et vigoureuses aquarelles. Il excellait surtout dans
ce genre décomposition, auquel il donnait toute la puissance et la
chaleur de la peinture à l'huile, et il y avait une habileté telle qu'il
improvisait le plus souvent tout à la fois d'un seul jet et son motif et
ses tons. Nous l'avons vu exécuter ainsi ses meilleures aquarelles,
celles que possède son camarade Fonville. Paysages de convention,
villa italienne, kiosque de l'Orient, château du moyen-âge, thermes
d'Hadrien à Késarié dans l'Asie-Mineure, toutes choses qu'il savait
sans les avoir vues,tout cela sortait de son pinceau avec une abondante
 variété de formes, une verve, une inspiration, un air de vérité qui
 trompait l'œil le plus exercé. Jamais Leymarie n'était plus à l'aise
 ni plus heureux dans ses compositions que lorsqu'il donnait carrière
 àson imagination, et qu'il y soumettait, comme à une autre cham-
 bre noire, les sujets qu'il voulait traiter. Il aimait à composer un
 site, à lui donner quelque chose de sa pensée ; à percher un bourg
 démantelé et son antique castel sur uu roc escarpé et nu, à faire de
 l'architecture et du style dans un paysage qui en était déshérité;
 il lui fallait avant tout créer, il n'aimail pas à copier seulement.
 Cette aversion, il l'avait prise probablement dans le cabinet du des-
 sinateur, et il l'avait gardée depuis le jour où il quitta la mise en
 carte pour la peinture.
     Ce fut de St-Rambert, de sa paisible retraite, qu'il s'était plu à
 orner de meubles gothiques, d'armes et d'objets d'art, où il se sur-
 prenait à compter ses vieux châteaux en Espagne ruinés par les
 événements, et à en élever d'autres plus magnifiques et plus fragiles
 encore, ce fut de là que partirent tous les travaux échappés à sa
 plume, tous les tableaux qu'il fit, soit pour des amateurs,