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190 LA REVUE LYONNAISE Le nez : Entre les deux vallons où font leur résidence Ces messagers du cœur pour leur ferme deffence Se dresse, ainsi qu'un mur eslevé sobrement, Du nez long et traitif le cresté bastiment. C'est luy qui n'estant qu'un sert à divers usage, La garite du chef, l'ornement du visage, L'alambic du cerveau, le juge des odeurs, Qui, recevant l'esprit, rejette les humeurs, La bouche : Bouche, où tant de beautez je voy représenter Que ma bouche la bouche assez ne peut vanter. Le poumon ses zéphirs par la bouche respire, L'estomac sa viande et sa boisson en tire, Dont il semble de fait, tant son secours est grand, Que la vie aux humains de la bouche despend, Car l'on voit au breuvage, au manger, à l'haleine, Ainsi qu'à trois filets pendre la vie humaine ! La langue : C'est toy, bouche, qui tiens sous ton palais voûté L'organe des saveurs, le membre plus vanté, La langue aux chaines d'or, charmeresse secrette, Indice de l'esprit, du vouloir interprette, Qui grande entremetteuse a les peuples domptés, Peuplé les bastiments, fait bastir les cités, Qui du doux Amphion est la lire amiable Et du nepveu d'Atlas le Moly véritable. Membre qui, si petit, fait des actes si grands, Semblable au gouvernail qui, sur les flots errants, Au vouloir de celuy qui fend l'humide plaine, A dos rompu, tout seul, un grand navire emmeine, Et tel que la Muette enflammant quelque fois Avec un petit feu les grand's touffes des bois. Pour ce l'ouvrière main qui ta langue a formée L'a de créneaux d'yvoire à bon droit enfermée,