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396 LA REVUE LYONNAISE teur de l'air, et celle qui lui revient incontestablement dans cette découverte. Cependant Pascal s'en attribue tout l'honneur, et ne fait même pas mention des conseils et des exhortations qu'il reçut de Descartes. L'amour-propre froissé ne peut faire excuser une négligence de cette nature, et l'on est bien forcé de recon- naître là l'homme de ce Port-Royal, où il eût été donné d'admirer la réunion de toutes les vertus chrétiennes, si celle qui sert de base à toutes les autres, l'humilité, n'avait fait défaut aux orgueilleux solitaires. La seconde partie du livre de M. Nourrisson est encore plus curieuse. Elle expose les relations qu'eut Pascal avec le chevalier de Méré, une personnalité trop oubliée du grand siècle, et l'influence singulière qu'eut sur la naissance des Pensées le contact de ce gentilhomme et celui de la société un peu frivole qu'il fut amené à fréquenter. Il est piquant de voir un libertin, comme on disait alors, contribuer à détacher Pascal des études géométriques, auxquelles il s'adonnait avec tant d'éclat, et l'amener parla à des études infiniment plus sérieuses et plus profondes. Petites causes, grands effets. La troisième partie, qui est de beaucoup la plus courte, est consacrée à l'étude des divers pseudonymes dont Pascal signa successivement ses écrits. Le Pascal que nous présente M. Nourrisson, au cours de ces remarquables études, est une figure dégagée des conventions de la légende. Écrivain d'un sens rassi, dépourvu de préjugés, l'auteur de ce livre fait une saine et vigou- reuse justice des notes qu'ont accolées au texte de l'auteur profondément chrétien des.Pensées Condorcet et Voltaire. Il a consacré ainsi le juste mépris dans lequel sont tombées ces élucubrations de mauvaise foi. Le Pascal de M. Nourrisson, le Pascal de l'histoire n'est ni un sceptique, ni un halluciné : c'est une grande âme dévorée de l'inquiétude des vérités éternelles, et faisant de leur recherche le but unique de sa noble existence. Libre aux philosophes du xvine siècle, dont l'impu- deur a sali tant de grandes choses, d'essayer de porter atteinte à la pureté de ce génie. Vengé de leurs dédains par l'admiration de la postérité, Pascal continue de jeter son éclatante lumière sur le siècle de Louis XIV, ou s'allumèrent tant de hautes intelligences. RELIGIEUSE ET MÈRE, par Marie BEPPA. — Paris. Librairie académique. Emile Perrin. 1885. — Un vol. Les pages de cette trop courte histoire sont empreintes d'une sensibilité pro- fonde, et recèlent des qualités qui la feront rechercher des lecteurs désireux de voir en scène la lutte des passions exprimées dans leur poignante réalité. L'auteur parle une langue châtiée, et son exemple prouve qu'on peut parfaitement peindre la vie telle qu'elle est, sans abuser des truculences du naturalisme actuel. Charles LA VENIR.