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IÔ2                        LA REVUE LYONNAISE

   On a dit que les pyramides d'Egypte avaient été construites pour
arrêter le vent du désert et empêcher la vallée du Nil d'être envahie
par les sables, ( i )
   C'est avec autant de raison que des savants ont avancé que les
poypes et les nuragues avaient été élevées par des peuples primitifs
comme postes d'observation, pour voir au loin et découvrir la
marche et les menaces d'un ennemi.
   Ainsi la Dombes, plate et couverte d'immenses forêts, aurait
éprouvé les mêmes besoins que la Sardaigne aux profondes vallées,
aux fières montagnes et aux rochers escarpés.
   La première, fangeuse, humide et privée de rochers, aurait élevé
des montagnes artificielles avec des terres péniblement amoncelées ;
la seconde, à la ferme ossature, aux rocs abruts, aurait construit des
tours isolées, en blocs souvent énormes, d'une élévation de dix à
vingt mètres, sans fenêtres, sans autre ouverture qu'une porte basse,
avec un petit escalier dans l'intérieur de ces murs sans ciment, deux
ou trois chambres superposées sans recoins, sans cheminées, un toit
nu, sans abri et sans parapet, le tout avec l'intention supposée de
surveiller l'étendue, comme on l'aurait fait d'un observatoire ou
d'un signal? Mais il est certain que la construction et la position de
ces deux espèces de monuments auraient fait manquer le but pro-
posé, en Dombes comme en Sardaigne.
   Qu'on attribue les monuments pélagiques de l'île africaine aux
Grecs ou aux Carthaginois, si on avait voulu des postes occupés par
des éclaireurs, on les eût placés sur des sommets, des pics, des êmi-
nences escarpées, au lieu de les bâtir au flanc de collines d'où la vue
était bornée et n'atteignait qu'un seul côté de l'horizon. Les murs
eussent été percés de barbacanes et de meurtrières. Enfin, le toit
eût été à barbette ou à parapet, au lieu d'être simplement arrondi
en cul-de-four.
   Si les poypes de la Dombes avaient eu le même objet, on ne les
eût pas assises le long de cours d'eau, dans le fond des vallées, dans
des sites isolés, tranquilles, mystérieux, où les chênes, les bouleaux

  (i) Voir les travaux de M. le duc de Persigny sur ce sujet.