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ALEXIS ROUSSET, SA VIE ET SES CEUVRES 33 prose ou en vers, toutes restées inédites. Quelques-unes furent jouées sur des scènes d'amateurs, quatre furent données au Gym- nase, à Lyon, et c'est sans esprit de camaraderie que nous pouvons déclarer que la plupart firent le plus vif plaisir. Que deviendront ces manuscrits précieux? Seront-ils imprimés? Seront-ils offerts à une de nos bibliothèques publiques où ils trou- veraient un abri sûr ? Nous faisons des vœux pour qu'une bonne pensée les protège, et qu'ils ne soient pas perdus, dispersés ou anéantis. Si le théâtre de Rousset le plaça haut dans l'estime de ses amis, ce furent ses fables qui lui donnèrent, dans notre ville, une véri table popularité. On comprend difficilement comment le poète grave et sérieux, qui maniait avec tant de supériorité le magnifique alexan- drin, a pu se plier au badinage du petit vers, au style gracieux et léger de la fable et faire courir sa plume à travers les méandres de la fantaisie et de l'imagination. Rien de doux comme sa grâce, rien de pur comme sa morale. Pauvre ilote, perdu en province, comme il eût été salué, acclamé, adulé dans les salons de Paris! Combien sont montés au pinacle, sans avoir fait la moitié de son œuvre ! Combien sont entrés sous le dôme des immortels avec un moindre bagage ! Demandez à M. Viennet ce qu'il eût pensé de la fable suivante : LE GRILLON ET L'ABEILLE ' « Voici l'hiver, » dit un grillon A sœur Abeille, sa voisine, « Et déjà le froid aquilon Nous menace de la famine. Daignez m'admettre auprès de vous Et m'héberger. Je suis bon diable. Un petit coin de votre table Me fera le sort le plus doux. Je saurai, par mon caquetage, Payer votre hospitalité, Et charmer les soins du ménage N° 55. — Juillet 1885. 3