page suivante »
28 LES VOYAGES DE MADAME DE SÉVIGNÉ « équipage est venu jusqu'ici sans aucun malheur ni sans « aucune incommodité : hier au soir, en menant abreuver « mes chevaux, il s'en noya un, de sorte que je n'en ai « plus que cinq; je vous ferai honte, mais ce n'est pas ma « faute. On me fait compliment sur cette perte, je la sou- « tiens en grande âme. » Le court séjour de Mme de Sévigné à Lyon et le temps passé dans la société de la marquise de Coulanges, avaient encore resserré les liens d'intimité entre ces deux amies, unies depuis longtemps à Paris par la communauté des goûts, des habitudes et des rapports de société. Proche parente du ministre Louvois, belle, spirituelle et très répan- due dans le monde de la Cour, Mme de Coulanges plaisait à sa cousine par un penchant à la raillerie et à la médisance auquel elle cédait, non par haine ou par envie du prochain, mais en manière de passe-temps et pour exercer son esprit en rapportant les nouvelles intéressantes sur ce qui se pas- sait autour d'elle. Pendant les premières semaines qui sui- virent la visite de la marquise de Sévigné, Mme de Cou- langes, restée à Lyon, lui écrit à Grignan trois lettres pleines des nouvelles de cette ville, qui pouvaient l'intéresser. Elle n'écrit point avec la grâce et le naturel de sa cousine, son style est précieux. Mais ses lettres sont à retenir pour les détails qu'elles contiennent sur un illustre personnage de l'époque étroitement mêlé à l'histoire de notre ville. L'une d'elles roule presque en entier sur le marquis François de Villeroy, fils du maréchal gouverneur de Lyon, et lui-même futur maréchal et gouverneur en survivance de son père. Le marquis de Villeroy était alors en disgrâce à Lyon où le roi l'avait exilé, en lui faisant défense de servir à l'armée au cours de la glorieuse campagne de Hollande. Il n'assista ni au passage du Rhin, ni à aucun des combats ou des